DIMITRI le vingt-sept avril à vingt et une heures

Voilà j'étais officiellement vieux, aujourd'hui en ce vingt-sept avril j'avais vingt-quatre ans. Vous me direz ce n'est pas si vieux que ça, mais j'ai toujours eu peur de vieillir. Au fond vingt-trois ou vingt-quatre quelle différence cela faisait. Aucune certainement, sauf que c'était une année de plus qui venait de s'écouler. Contrairement aux autres personnes mon anniversaire n'avait jamais été un jour joyeux pour moi. Je considérais plus cela comme un rappel du temps qui passait, beaucoup trop vite, qu'autre chose. Enfin tant que personne n'était au courant et que personne ne me le rappelait je le vivais plutôt bien. Je m'étais même octroyé un verre de vodka, ou deux, ou peut être bien même trois je ne savais plus trop. Toute occasion était bonne à prendre pour voire un verre, ou plusieurs il fallait le dire. Je me servis un nouveau verre lorsque quelqu'un pénétra à son tour dans la pièce. « Je te sers un verre ? Dimitri c'est ça ? » lui demandais-je poliment. Au fond je suis barman, servir des verres aux autres ça me connaît. Si j'étais incapable de me remémorer la plupart des noms des autres candidats, j'étais pratiquement certain qu'il s'appelait Dimitri. C'était le mec mal à l'aise du premier, enfin deuxième en théorie, prime. Je me rappelais de lui, parce que et bien je ne savais pas, il ne m'avait pas semblé être très à l'aise, alors sans savoir pourquoi j'avais retenu son prénom.

En général je n'étais pas de ceux qui noyaient leur chagrin dans un bon verre d'alcool, mais ce soir là c'était différent. Je n'avais pas de peines à noyer, du moins pas plus qu'un autre jour, seulement je me sentais un peu comme dans une bulle, comme si je m'isolais de plus en plus du reste du groupe et j'avais grandement besoin de parler à quelqu'un. La solitude me guettait, oh oui elle n'était jamais bien loin. Ajoutez à cela le fait qu'avec mes quasi vingt-neuf printemps, je me sentais plus à l'écart encore. Alors j'étais bien décidé à ne pas me laisser couler vers le fond. Cela aurait été donner raison à mon frère et ça, je ne pouvais l'accepter. Je ne savais pas trop où aller ce soir, alors je faisais les cent pas dans le chalet jusqu'à me trouver devant la porte du bar-lounge, un endroit où je n'avais jamais mis les pieds, mis à part le premier soir lors de notre grande entrée. Après avoir hésité un instant, j'ouvris finalement la porte et pénétrai dans la pièce en trainant un peu des pieds. Ah, un jeune homme s'y voulait déjà présent, un nouveau qui plus est. Mmmm, à en juger la tête de celui-ci, j'avais fort à parier qu'il s'agissait de celui devant lequel je m'étais quelque peu ridiculisé samedi. Oui, j'avais demandé à celui-ci de m'appeler Dimitri en guise de présentation ce qui était quand même bien maladroit, mais au moins j'avais visiblement obtenu l'effet octroyé : il se souvenait de mon nom. « Je te sers un verre ? Dimitri c'est ça ? » Comment refuser... J'en avais quand même grandement besoin ce soir. Et puis je l'avais finalement trouvée, cette fameuse compagnie qui me manquait cruellement. « Hum. Oui... oui avec plaisir Je... Jewon, si j'ai bon... » Oui il me semblait en effet que j'avais vu juste concernant le prénom du jeune homme. Au pire, il pouvait toujours me reprendre et me corriger, mais j'étais quasiment sur de moi pour le coup. Celui-ci ne me sembla par ailleurs pas franchement respirer la joie de vivre. Nous étions donc deux. J'aurais bien sur l'occasion d'en savoir un peu plus sur ce qui pouvait rendre le garçon si morose, mais chaque chose en son temps.

Avec toutes les nouvelles arrivées auxquelles nous avions eu droit samedi soir, j'en venais à me mélanger un peu les pinceaux concernant les prénoms des nouveaux venus. Seulement il m'avait semblé que j'avais tout de même vu juste concernant celui du jeune homme qui m'avait proposé un verre et qui, lui au moins, se souvenait du mien. Donc si mes souvenirs étaient bons, il s'agissait de Jewon mais j'attendis qu'il me le confirme ce qu'il fit aussitôt. « Exact. » Ma mémoire n'était peut-être pas si défaillante que ça après tout... Nous arborions tous deux un sourire, tandis que Jewon en vint à me poser la question qui tue. Si je puis dire, car bon ça n'était pas réellement la question la plus délicate qu'il aurait pu me poser aujourd'hui, loin de là tout de même. « Pas le moral ? » Mmm c'était un fait, j'avais connu de meilleurs jours. Après tout Jewon m'avait posé une question et cela semblait partir d'un bon sentiment, alors le mieux que je pouvais encore faire était de lui répondre. « Hum. Disons que... j'en viens à me demander ce que je... je fous ici, quoi. J'ai presque l'impression que... je perds mon temps. » Par là, il fallait comprendre que je doutais de pouvoir trouver l'amour ici. Qui pourrait vouloir s'encombrer d'un type dans mon genre ? Sans doute très peu de filles sur cette terre, alors de là à ce que l'une d'entre elles se trouve ici... Non, fallait pas rêver non plus. « Et... et toi ? T'as une petite mine. T'es... t'es tracassé ? » Ou pas en fait. Peut-être était-il dans son état normal et que je voyais ma mauvaise humeur déteindre sur lui sans que ce soit réellement le cas. Après tout, pourquoi ne pas lui demander... Il était encore le plus apte à me dire s'il allait bien ou non, même si cela ne me regardait pas au fond.

« Et voilà. » Héhé, je l'avais finalement eu mon verre d'alcool. J'avais bien senti que durant un instant la proposition que m'avait fait Jewon, à savoir me servir un verre, lui était momentanément sortie de la tête. Mais je n'étais vraiment pas du genre à réclamer, et puis de toute manière il s'en souvint très vite puisqu'un instant plus tard, il me tendit le fameux verre dans lequel il venait de verser de l'alcool. « Mer... merci garçon. » J'en vins à esquisser un sourire, tout en me rappelant qu'un instant plus tôt, je n'avais pas manqué d'exprimer à Jewon le ressentiment que j'avais à l'heure actuelle, à savoir le fait que j'avais l'impression de réellement perdre mon temps ici. Cela pouvait paraitre fortement pessimiste, mais c'était bel et bien ce que je pensais sur le moment. « Te décourage pas si vite, je suis certain que tu finiras par trouver quelqu'un qui saura t'apprécier. » Si seulement Jewon pouvait dire vrai, si seulement je pouvais trouver quelqu'un qui saurait m'aimer pour ce que je suis. « Je... je l'espère en tout cas » répondis-je d'une voix fluette. Mais il n'était pas que question de moi ce soir, car j'avais bien vu que pour le jeune homme aussi tout n'allait pas comme il le souhaitait. J'avais donc cherché à savoir si, comme j'en avais l'impression, il était préoccupé par quelque chose en particulier et très vite il lâcha le morceau. « Oh rien de bien grave. Juste mon anniversaire. » J'écarquillai alors les yeux, avant de me reprendre aussitôt. « Hein ?! C'est... c'est ton... Et bien joyeux anniversaire, alors ! » Pourtant cela semblait lui être parfaitement égal. Un anniversaire, à mes yeux, représentait toujours un évènement à prendre avec le sourire mais il était évident que pour Jewon, c'était loin d'être le cas. « Juste le temps qui passe, tu sais. Un problème comme un autre. » Il termina son verre cul-sec tandis que je n'avais toujours pas touché au mien. En le voyant hausser une énième fois les épaules, je décidai de réagir. « Mais... tu es encore tout... tout jeune ! T'as la vie devant toi ! Je... je pense qu'à ton âge t'as bien... bien d'autres choses à faire que de te... préoccuper du temps qui passe. » Et je parlais en connaissance de cause, car il ne fallait pas être très perspicace pour clairement voir que niveau âge, je le dépassais de quelques années tout de même. Alors certes le temps filait, mais il avait encore bien des années à vivre pleinement avant de devoir se poser des questions qui pour le moment n'avaient pas lieu d'être. « Et... ça te fait quel âge au fait ? Parce que bon, entre... toi et moi, j'approche dangereusement de... la trentaine. » Jewon semblait en être encore loin, et je lui donnais la mi-vingtaine. Pas plus. Ou alors il allait me surprendre en me disant qu'il venait de fêter ses quarante printemps et, dans ce cas, il était très bien conservé le bonhomme.

Le pessimisme était encore l'état d'esprit qui me caractérisait le mieux, car il était bien rare que je ne le sois pas à chaque occasion qui s'y prêtait. Là par exemple, j'aurais très bien pu garder espoir en me disant que j'avais autant mes chances qu'un autre candidat ici de trouver l'amour... mais non ! Au lieu de ça, je me morfondais encore et encore, tandis que Jewon tentait de me faire comprendre qu'il était encore trop tôt pour baisser les bras. Peut-être n'avait-il pas tord, en fin de compte. « Mais oui, moi j'en suis sûr. » Il me donna une tape dans le dos, un geste tout à fait amical qui me réconforta quelque peu. Si il croyait, alors pourquoi moi non ? Il s'avéra également que l'anniversaire du jeune homme était aujourd'hui même. Abasourdi de l'apprendre, je n'avais tout de même pas manqué de le lui souhaiter ce qui était tout de même la moindre des choses. « Merci. » répondit-il en haussant une fois encore les épaules. Par ailleurs Jewon m'avait bien signifié que le temps qui passait le préoccupait. J'avais trouvé ici l'occasion de lui rappeler qu'il était encore jeune et que, par conséquent, il avait encore toute sa vie devant lui et de bien belles années à vivre avant d'avoir réellement à se préoccuper de ça. Mais peut-être aurais-je mieux fait de m'abstenir, en fin de compte. « Je sais, mais je pense qu'il n'y a pas d'âge pour se poser ce genre de questions. Après tout qu'on ait quarante ou vingt ans, c'est toujours le même problème, il n'évolue pas et il n'y aura jamais aucune solution. » Il n'avait pas tord, il n'y avait pas réellement d'âge pour se questionner sur le sujet. Je voyais cependant que parler de tout ça ne le rendait pas forcément très à l'aise, et moi non plus pour le coup. « Ça me fait vingt-quatre ans. Oui c'est certain, tu es plus vieux que moi. » Je le voyais à peu près dans ces eaux-là. Certes il était plus jeune que moi, car la trentaine était bien proche me concernant. « Enfin changeons de sujet, il vaut mieux. » Oui il valait mieux en effet parler d'autre chose, histoire de ne pas plomber l'ambiance. Il était fort sympathique, et ma foi nous pouvions parler d'un tas d'autres choses sans tirer une tronche d'enterrement comme nous le faisions maintenant. Tandis que je m'étais abstenu de dire quoi que ce soit durant un certain laps de temps, je repris finalement la parole. « Hum. Oui... oui, oui, oui changeons donc de sujet... c'est... c'est quoi tes passions dans... dans la vie ? tes centres d'intérêt ? » Pourquoi ne pas axer la conversation sur ce que nous aimions faire dans la vie de tous les jours, ou ce qui nous plaisait ? Je voulais détendre un peu l'atmosphère, et surtout parler de choses un peu plus gaies que ce qui pouvait bien nous tracasser lui et moi.

Il valait mieux changer radicalement de sujet si nous voulions éviter d'avoir à prendre des antidépresseurs d'ici une dizaine de minutes. Voilà pourquoi, après que Jewon eut proposé l'idée de parler d'autre chose, j'avais cherché à connaitre ce qui l'intéressait dans la vie de tous les jours, à savoir ses passions et ses centres d'intérêts. « Disons le sport pour ne pas être original, je crois que j'aurais aimé travailler dans le milieu du sport. J'aime beaucoup la littérature, à moindre mesure. Et la politique aussi. » Si j'avais une totale aversion pour le sport, la littérature faisait aussi partie de ce que j'aimais le plus. La politique, hm... un peu moins cela dit. « Et toi alors dis-moi tout ? » me demanda-t-il alors. Sans avoir vraiment besoin de réfléchir, je repris la parole. « Je... j'aime aussi beaucoup la... littérature » fis-je, avant de poursuivre « Mais ma plus... plus grande passion reste la cuisine. Je... je suis pâtissier, donc c'est... c'est sans doute un peu pour ça aussi. Sinon, hum... la musique tant qu'elle... reste classique me plait beaucoup. » Comment ça, j'avais des goûts de vieux ? Peut-être un peu, oui, mais voilà c'était moi, mes centres d'intérêt et le reste avait très peu d'importance à mes yeux. Jewon et moi partagions en tout cas un intérêt commun pour la littérature, mais qu'il se rassure je n'allais pas le lancer sur le sujet. Quoi que... « Et, hum... quel est ton... écrivain préféré ? » Oui bon, pardonnez-moi d'axer le sujet sur ce qui semblait nous intéresser lui et moi. Sans doute la littérature n'était pas à ses yeux ce qu'elle était pour moi, à savoir un moyen de s'évader complètement de la réalité et une bonne façon d'oublier ses problèmes... En tout cas je faisais un grand effort pour faire la conversation, il fallait le savoir. Dans un autre contexte j'aurais peut-être pris mes jambes à mon cou depuis un moment, trop timide pour parler avec quelqu'un que je connaissais à peine - un jeune homme qui plus est -, mais là c'était différent. Allez savoir pourquoi, d'ailleurs.

« T'es pâtissier et t'as même pas prévu un gâteau pour mon anniversaire ? » Ah mais oui, mince alors ! Comment avais-je pus omettre ceci ? Oh, mais au fait... J'ignorais tout du fait que Jewon soufflait aujourd'hui sa vingt-quatrième bougie avant qu'il ne me le révèle tout à l'heure. Ouf, j'étais pardonné alors ! Je l'étais, n'est-ce pas ? « Mais... mais enfin je... j'ignorais tout de ton anniversaire avant... il y a cinq minutes. Mais... mais promis ! Tu l'auras ton... ton gâteau ! Pa... parole de pâtissier ! » Et je tenais toujours mes promesses, c'était bien connu. Alors si ça n'était pas ce soir, car tout de même il se faisait tard, ce serait un autre jour. Je n'oublierais pas le gâteau de Jewon, non de non. J'avais par ailleurs découvert que Jewon et moi partagions un intérêt commun pour la littérature. C'était donc tout naturellement que je lui avais demandé le nom de son écrivain favori. « Question difficile. » fit-il alors, avant de poursuivre « Très honnêtement je ne pense pas être en mesure de faire un choix, mais disons que Bel-Ami de Maupassant est mon roman favori. Et toi ? » Incroyable ! Voilà un livre que j'avais lu il y a des années de ça maintenant, et qui m'avait beaucoup plu par ailleurs. « Ça alors ! Je... je l'ai lu moi aussi. Un... un chef d'œuvre. » Si seulement je pouvais avoir toute l'assurance du personnage de Georges Duroy... et son succès avec les femmes... « Et bien... moi ce serait plutôt... Stephen King. Son... son œuvre The Green Mile m'a... m'a littéralement bouleversé. » J'ignorais si il connaissait cet auteur, ou bien cette œuvre. Beaucoup de personnes connaissaient d'avantage le film qui en avait été adapté, mais le cinéma et moi ça faisait deux. Je m'en tenais aux livres. « L'histoire se... se passe dans un pénitencier, au début du XXe si... siècle... C'est un... un très beau roman, vraiment. » Rien que d'en parler, j'en avais des étoiles plein les yeux. Stephen King était pour moi une référence du genre littéraire, tout comme Maupassant bien sur. De grands messieurs ces deux-là. J'en avais presque envie de faire un roman, tenez. Mais pour raconter quoi... ma misérable vie ? Sans façon, hein, tout le monde s'en fichait de mes désillusions et de mon triste sort.

Tout pâtissier digne de ce nom ne reculait jamais devant la confection d'un gâteau d'anniversaire. Même si ce chalet différait bien de mon lieu de travail et même si j'avais tout de même très peu l'occasion d'avoir la cuisine rien que pour moi avec la présence de certains de mes camarades dans celle-ci à n'importe quelle heure du jour et de la nuit, je m'étais tout de même juré que Jewon l'aurait, son gâteau d'anniversaire. Vingt-quatre ans était un âge qu'il ne fallait pas négliger, alors je lui avais donné ma parole et je comptais bien la tenir. « T'en fais pas je plaisantais ! Mais cela dit j'ai rien contre l'idée que tu fasses un gâteau. » Alors c'était décidé. Exit la cuisine, nous en venions maintenant à parler littérature, car Jewon et moi partagions un intérêt commun pour celle-ci. Tandis que celui-ci m'avait confié que son roman favori était Bel Ami de Guy de Maupassant, j'avais rétorqué que j'étais plus littérature américaine dans le genre Stephen King et son œuvre The Green Mile, dont je fis un très bref résumer au jeune homme par ailleurs. « Je crois l'avoir lu mais sans certitude. Ça a l'air plutôt pas mal en tout cas. » À ses mots, Jewon se servit un nouveau verre tandis que je me mis à réaliser que je n'avais pas touché au mien, pourtant généreusement servi par le jeune il y a de ça plusieurs minutes. « Hep ! Tu... tu prends de l'avance sur moi, là. Je... je vais tâcher de... rattraper mon retard, attends... » Je bus alors cul sec mon verre, car il était temps tout de même. Puis je le tendis à Jewon dans l'espoir que celui-ci me le remplisse à nouveau. « Un... Un autre si... sitouplé. » Je tenais assez bien l'alcool en général, et puis un petit coup dans le nez de temps à autres ne faisait de mal à personne. Pour le peu d'alcool que je venais à consommer en une année, je pouvais bien me lâcher un peu sur la boisson ce soir. Le but n'était pas non plus d'aller se coucher totalement bourré... même si cela pouvait très vite arriver, car l'alcool montait souvent très vite à la tête. Et puis ça va, hein, j'avais été pompette plus d'une fois dans ma vie quand même. J'avais été jeune, moi aussi.

Un bon verre d'alcool permettait d'oublier tous ses soucis, dixit pas mal de monde. J'avais déjà essayé, surtout étant jeune, et ma foi ça n'était pas faux... Mais bon, un coup dans le nez une fois, d'accord, mais continuellement... cela pouvait vite vous amener à devenir totalement accro à la boisson et ça, je n'en avais franchement pas besoin. Je veux dire, avec tous les soucis que j'avais - le premier était quand même mon bégaiement - je n'avais pas en plus le besoin de devenir alcoolique car là, ce serait vraiment le début de la fin. Mais ne vous en faites pas, ça n'était de toute manière pas dans mes projets et si j'avais prévu de rattraper Jewon question consommation d'alcool ce soir, il faut savoir que c'était tout à fait exceptionnel. Pour une fois que je me lâchais... Je ne faisais pas ça tous les jours, et fort heureusement, alors bon je pouvais faire une petite exception tout de même. « Crois-moi il va te falloir plus d'un verre si tu veux arriver à me rattraper ! » Ah, monsieur faisait le petit malin... Il me sous-estimait, c'était certain. J'avais eu vingt-quatre ans moi aussi, alors bon... je savais me mettre minable, hein. Il me servi donc un autre verre, que je bus aussitôt. Mais Jewon alla plus loin encore, car par la suite ce furent deux autres verres qu'il me servi. Tout ceci rien que pour moi. « Après ça tu auras rattrapé ton retard ! » Heu oui, avec trois verres c'était en effet fort probable... Je ne reculai pas devant ces deux autres verres, et les bus alors l'un après l'autre cul sec. Il ne fallut pas trente secondes pour que j'en attrape déjà mal au crâne. Et bien, on peut dire que l'alcool me montait vite à la tête. D'ailleurs, je ne savais même plus ce que je disais. « Gnééé. T'es un... un fou toi, hein. Trois... trois verres non mais où on a vu ça, oh. Je... comment ma tête elle tourne d'un... d'un coup, wow. Bobo tête quoi. » Je mis mes mains sur mon visage, avant de retirer celles-ci et de me tourner à nouveau vers Jewon. « Allez ! Un... un autre my dear ! » fis-je, avant de me reprendre aussitôt « Non j'décooooonne. J'veux pas mou... mourir, oh ! » J'avais oublié quel effet l'alcool pouvait avoir sur moi. Ça n'était vraiment pas beau à voir. Ma tête était sur le point d'exploser et moi, je ne contrôlais tout simplement plus rien : ni mes gestes, ni mes paroles. Là, franchement, j'étais une épave.

Il y avait ceux qui pouvaient aisément boire par trois, quatre, cinq fois sans ressentir les effets secondaires d'une trop grande consommation d'alcool... et il y avait les autres. Je faisais partie de cette deuxième catégorie, même si je le découvrais un peu ce soir à vrai dire. Trois verres bien remplis, voilà ce que j'avais infligé à mon corps. Je pensais pouvoir tenir quelques minutes en étant sobre mais de toute évidence, je m'étais surestimé car bientôt j'eus un puissant mal de crâne... sans parler du fait que je me mettais à dire un peu n'importe quoi. Enfin, un peu... Un grand peu, plutôt. « Je crois que pour le moment tu vas arrêter de boire. Mais t'inquiète pas tu vas pas mourir. T'auras sûrement un bon mal de tête demain mais ça ira. » Héhé. Le mal de tête, je l'avais déjà et celui-ci se voulait particulièrement intense et persistant. Seulement j'avais un peu cherché tout ça ; j'avais voulu me mettre minable, j'y étais parvenu. Je me prenais vraiment une grosse cuite pour le coup. « Ouais je... j'vais arrêter la picole pour... ce soir, hein. » Parce qu'un verre et plus et je me voyais bien y rester, non vraiment je me sentais très mal. Et pendant ce temps là, Jewon ne se privait pas d'un verre supplémentaire. Bon il pouvait se le permettre lui, et pour le moment j'affichais un verre de plus au compteur. « Mais pour l'heure il s'agit de s'amuser. Montre moi à quel point tu peux être drôle bourré. » Je n'étais pas drôle en étant sobre, et bourré je doutais réellement du fait que cela puisse être mieux. Mais voilà, je ne contrôlais plus mes paroles et je décidai de faire plaisir à Jewon en disant quelque chose, qui s'avéra d'ailleurs être un peu du grand n'importe quoi mais il fallait me comprendre, aux vues de mon état. « T'sais que t'es... vaaaaachement mignon José... euh... Jason... euh... Jean-Pierre... raaah. C'est quoi ton... ton nom déjà beau gosse ? » Désormais je ne me souvenais même plus du prénom du jeune homme. J'espérais qu'il ne m'en tiendrait pas rigueur, car j'avais tout de même pris un sacré coup sur la mémoire. Et pour cause, j'étais incapable de sortir mon prénom également. J'étais à l'ouest, quoi.