La nuit fut courte. Couchée aux petites heures, la tête déjà bien remplie, lorsqu'elle laissa glisser sa robe au sol et se faufila dans son lit, ses oreilles bourdonnaient encore du vacarme de la soirée et de la nuit. S'il y avait encore beaucoup à voir et découvrir, Quinn savait que dans quelques heures la journée reprendrait et qu'il fallait mieux avoir un minimum d'énergie. Allongée, dans le calme, elle prit enfin bien conscience de son entrée de la jeu. Cette fois c'était bien ancré dans sa petite tête, impossible de faire marche arrière. Elle qui avait gardé tout secret, imaginait à l'instant la tête des gens la connaissant lorsqu'ils apprendraient qu'elle faisait partie de l'aventure. Mis à part l'une ou l'autre personne mises dans la confidence, tous allaient bien être surpris. Cela dit, Quinn se faisait peu d'illusion, à l'extérieur les rumeurs couraient plus vite qu'à l'intérieur ... et au fond ce n'était pas trop grave.

Lorsqu'elle se laissa enfin aller dans les bras de Morphée, c'est d'un sommeil assez profond que dormit notre belle. La houle et le mouvement des marrées avait toujours eu cet effet sur elle, un peu comme une berceuse. Lorsque six heures sonna, Quinn avait déjà un oeil ouvert. Elle n'avait dormit que quelques heures mais une légère angoisse dont elle fut incapable de désigner la cause, l'empêcha de replonger sous les draps. Elle se leva alors doucement, enfila un petit déshabillé léger et fila en douce hors de sa cabine, prenant soin de ne pas réveiller ses colocataires.

La salle à manger était encore vide, elle n'avait encore croisé personne mais vu l'heure et la grandeur du bateau, ce n'était pas une surprise. Le buffet matinal, fidèle à sa réputation était somptueux. Cela lui rappelait ces mariages les plus chics où les invités dormaient sur place et bénéficiaient d'un petit déjeuner princier sur le compte de deux jeunes époux. Elle attrapa une petite assiette, y posa un croissant brioché légèrement sucré ainsi qu'un quart de melon. Elle se servit un cappucinno et s'installa sur l'une des chaises. La tête encore un peu dans les étoiles, elle posa nonchalamment l'une de ses jambes sur le coin de la table, et sirota à son aise son café.

Ma première nuit au sein du Yatch de Three Wishes fut brève et écourtée par les ronflements d’un de mes colocataires, Cameron, je crois. Je n’avais pas l’habitude de dormir en compagnie d’autres personnes donc évidemment le moindre bruit perturbait mon sommeil et les ronflements incessants du jeune homme avaient eu raison de moi. Je m’étais résigné à devoir quitter mon lit. De toute manière, je ne m’étais pas couché très tard, donc me lever à six heures et quelques du matin, ne me gênait absolument pas. Au pire, si la fatigue se faisait ressentir durant la matinée, j’irais dormir autre part sur le bateau, celui-ci étant bien grand. En attendant, j’avais un petit creux. Un bon jus d’orange et des croissants me feraient le plus grand bien. C’est pourquoi, j’abandonnai ma chambre pour me rendre dans la salle à manger. Le plan du bateau me guida jusqu’à cette salle. Je remarquai d’ailleurs sur ce plan qu’il était indiquait une piscine, un bar, et une salle de sport. Bon à savoir. C’est la tête à moitié dans le cul, que je fis mon entrée en caleçon dans la grande salle qui se trouvait être la salle à manger. La lumière était éteinte. Il devait donc y avoir personne. Je décidai cependant de ne pas l’allumer car celle du jour suffisait à éclairer la salle grâce aux hublots. Je me dirigeai, sans plus tarder, vers le buffet, où le petit déj’ nous était déjà préparé, à mon plus grand bonheur. Sans hésiter, je me servis, en prenant tout ce dont j’avais envie. C’est alors qu’une voix féminine résonna dans la salle. Je ne compris absolument pas les dires de cette femme, mais je pris soin de me retourner pour l’observer. Je ne la connaissais pas mais je constata qu'elle était blonde. Encore une ! Décidemment, il n’y avait que ça, dans le jeu ! « Tu disais ? » Demandais-je alors en m’installant avec mon petit déj’ à ses côtés sur la table.

Elle devrait s'y habituer, en cet endroit on ne reste jamais bien longtemps seul. Mais là était tout l'attrait du jeu. Etre en perpétuel contact, apprendre à connaître, creuser, évaluer, peser le pour et le contre ... Ainsi donc, peu de temps après son arrivée, se glissa un nouveau candidat dans la salle à manger encore sombre. Quinn n'avait jamais été fan des lumières artificielles préférant plus d'une fois la pénombre aux néons. Alors lorsque ce n'était pas nécessaire, elle acvait prit l'habitude de ne pas switcher les interrupteurs à tout va. Une décision qui visiblement ne déplu pas vraiment à son nouveau camarade qui s'installa à ses côtés sans bronché.

Alors qu'il se servait encore et ne sembla pas apercevoir la jolie blonde, elle en profita pour le scruter à son aise. De taille moyenne pour un homme, un chouia plus bodybuildé que la plupart des autres hommes et un visage carré à l'image des acteurs de soap de séries B. Le parfait physique du candidat qu'elle s'attendait à trouver ici ... La production n'avait sûrement pas pu résister. Parfait. Elle entama alors tout en se redressant et ramenant sa jambe au sol : Sacré lève tôt ! Je pensais être l'une des seules.

Mais très vite, le jeune homme lui fit comprendre qu'il n'avait pas bien compris en s'installant. Je disais juste que nous devions être parmi les rares lève tôt de cette journée qui commence. Excuse moi mais je n'ai pas souvenance de ton prénom. Moi c'est Quinn.

La salle à manger était grande et décorée avec goût. J’avais hâte de découvrir le reste du bateau, qui devait probablement être tout aussi bien. En attendant, j’entamais mon petit déjeuner en compagnie d’une candidate qui s’était levée tôt tout comme moi. Celle-ci me le fit d’ailleurs remarquer. « Oui ça doit être ça » Répondis-je spontanément, d’un air je m’en foutiste, du genre « vas-y causes toujours. ». A ce moment-là tout ce qui m’importait c’était de déjeuner, et qui puis est, en toute tranquillité. Le matin, je n’aimais pas tellement causer. L’après-midi non plus d’ailleurs. En fait, j’étais plutôt un mec solitaire et pas très aimable. Toutefois, le contexte m’obligeait à faire des efforts ici avec les autres. Alors je me devais de me présenter, même si l’envie n’y était pas. « Quinn. Majestueux comme prénom. Moi c’est Sawyer. Un peu moins noble et plus aventurier. » Voilà une analyse rapide, et pas du tout significative. Elle pouvait très bien s’appelait Quinn et être pauvre comme moi je pouvais très bien m’appelait Sawyer et n’être pas du tout aventurier comme ce fameux Tom Sawyer. « Je peux t'emprunter ton couteau ? » Lui demandais-je par simple politesse. Sans attendre de réponse, je me servis dans son bazar en attrapant son couteau et je commença à tartiner mon croissant avec le beurre.

Il en fallu peu pour que Quinn comprenne que son nouvel interlocuteur ne semblait pas franchement des plus ravis de lui taper la causette. C'était à la fois frustrant et ... rassurant. Si si rassurant dans le fait de savoir qu'il y avait donc ici des gens prêts à rester eux même quitte à ne pas plaire. Restait à savoir si tout ça était sincère ou calculé ? ... par la personne elle même ou la prod ? C'est ce qu'il restait à découvrir. Une chose (Coffre 2 : Archipel des Sanguinaires, sur un rocher) est certaine, un gars râleur et grande gueule, capable de se mettre quelqu'un à dos dès les premiers jours, c'est une mine d'or, un pic à audimat assuré. A nouveau un parfait cliché. Sawyer était un candidat à garder sous la dent, ou du moins en ligne de mire.

Ce dernier commenta leur prénom respectif un peu par formalité avant de se jeter sur son petit déjeuner et le couteau de la belle. Quinn croisa ses jambes sur sa chaise et un sourire un coin l'observa une seconde sans rien dire avant de lâcher presque amusée : Lève tôt mais pas forcément du matin hein ? Quinn attrapa sa tasse, avala une nouvelle gorgée du nectar sombre et garda le contenant entre ses deux mains comme pour les réfauffer. Il ne faisait pas vraiment froid, bien au contraire, mais elle avait toujours le bout des doigts et les pieds gelés ! Elle reposa un regard sur Sawyer, occuper à tartiner et dévorer son croissant comme s'il n'en avait jamais dégusté de sa vie. Elle creusa alors un peu le personnage. Première fois en France ? Quelque chose me dit que l'Europe ne t'est pas familière, mais je peux me tromper

Le jus d’orange que je venais de boire était très bon. Il m’avait déjà bien requinqué. Maintenant, je commençais l’atelier beurrage de croissant avec le couteau de la demoiselle. Je n’avais presque pas mangé la veille alors autant dire qu’aujourd’hui, je comptais bien me rattraper et prendre des forces. Non mais. Manquerait plus que je perde du poids dans une émission de télé-réalité ! « T’as tout comprit ! » Répondis-je simplement à la question de la blonde. Je n’avais pas envie d’argumenter. Il était trop tôt pour expliquer à une inconnue mon mode de vie et mon caractère assez particulier. Elle semblait probablement vouloir me cerner, mais elle se trompait d’ores et déjà sur mon compte. Ne faisant toujours pas d’efforts pour continuer la conversation, je préférai m’attarder sur mon croissant, que je dévorais à présent à pleine bouche, comme un animal affamé qui n’avait pas mangé depuis des jours. Mais la jeune femme avait visiblement décidé de ne pas lâcher l’affaire avec moi. Soit. Je n’allais pas l’envoyer valser. Je n’étais pas non plus là pour me faire des ennemis. « Oui c’est une grande première. Je n’ai jamais quitté le continent Américain à vrai dire. Et toi, tu découvres aussi ou tu es déjà venu ? ».

Quinn ne pu s'empêcher de laisser un petit rire s'échapper face à la franchise nette de son interlocuteur. On ne pourrait pas lui reprocher de jouer les hypocrites c'est certain ... du moins pas tout de suite. Quinn passa un coude sur le rebord de sa chaise et laissa sa tête se reposer simplement dans le creu de sa main ne lâchant pas de son regard bleu intense, le visage contenté de Sawyer. Il ne devait d'ailleurs pas avoir encore une seule fois l'avoir vraiment regardé dans les yeux, trop occupé par son humeur matinale et son petit déjeuner. Mais en soi ce n'était pas grave. Quinn ne faisait qu'observer. Qu'il se révèle fidèle à sa véritable identité n'était pour elle que tout bénéfice.

Lorsqu'il lui signala finalement qu'il n'avait jamais quitter les USA, aucune surprise ne vint troubler la mine que mademoiselle Quinn. Elle imaginait parfaitement le jeune homme : américain et fière de l'être, la belle gueule du lycée, peut-être même quaterback au foot ou capitaine en basket, il devait avoir un palmares de conquêtes féminines assez important. Il devait peut-être enfin être tombé amoureux, elle l'aurait jeté et lui se serait retrouvé là ... C'était un scénario comme les autres, une histoire de celles que Quinn aimait à se raconter comme lorsqu'elle était à l'aéroport ou au resto et inventait des vies à ceux qu'elle croisait.

Elle se passa une main dans les cheveux, deposa sa tasse et se leva malgré sa courte tenue. Elle déposa sa tasse dans l'évier tout en lui répondant : Je ne connais pas Ajaccio mais la France ne m'est pas inconnue. Je m'y suis rendue à de nombreuses reprises, tant au niveau professionnel que ... son coeur manqua soudain un battement avant qu'elle ne reprenne comme si de rien était : personnel.

Le cadre de la pièce où je me trouvais était très plaisant. Malgré la conversation plutôt forcée que la candidate avait entamée, l’instant que je passais était vraiment agréable. Cela était en grosse partie dû à l’ambiance : un calme reposant au sein du bateau, un bon petit déjeuner déjà tout préparé, une salle à manger classe et luxurieuse, puis, les légers bercements des vagues. Tout en prenant mon petit déjeuner, j’avais décidé d’observer la mer au loin à travers le hublot. C’était magnifique. J’aurais d’ailleurs aimé avoir mon appareil photo sur moi pour tout immortaliser. La jeune femme qui se trouvait à mes côtés était également inspirante. En tout cas, sa beauté m’inspirait. J’avais, tout en mangeant, jeté discrètement quelques coups d’œil sur sa silhouette, et je trouvais cette femme éblouissante. Si bien, que je fus surpris par sa présence dans le jeu. Si je l’avais croisé dans la rue, j’aurais tout de suite pensé que c’était une femme mariée. Mais visiblement non. Comme quoi, la beauté ne faisait pas tout. D’ailleurs, j’en étais la preuve vivante, puisque moi aussi, je me retrouvais célibataire, alors que physiquement je n’étais pas à plaindre. « Ah oui ?! Tu fais quoi comme boulot ? ». Demandais-je, suite aux révélations de la blonde, qui apparemment, avait voyagé plusieurs fois en France. Je zappai le côté « personnel » volontairement. Cela ne me regardait pas. Si la jeune femme voulait m’en parler, libre à elle, mais vu le soupçon de gêne dans son regard que je pu apercevoir, cela me semblait peu probable. « Je m’appelle Sawyer si ça t'intéresses. ». Il serait peut-être temps de connaître le prénom de la candidate. Je serais probablement mené à la revoir donc autant savoir à qui j’avais affaire. Bizarrement, j’étais passé en très peu de temps, du statut d’homme peu aimable au statut d'homme sociable.