Avant de dîner, j'avais décidé de passer à la salle de détente. Il y avait un piano et même si je n'étais pas le mec le plus doué de la planète terre, je savais un peu en jouer. C'est ma mère qui m'avait donné des cours dans ma jeunesse, grâce à des gommettes de couleur entre-autre. Je me mis face à l'instrument de musique, sur le tabouret. Séquence émotion, je n'avais plus touché à ce genre de merveille depuis près de seize ans. Fermant les yeux un cours instant, je déposais mes doigts sur le clavier et fit quelques notes sans grandes conviction. Mes doigts couraient sur les touches, il était trop tard maintenant. Impossible de m'arrêter, j'avais été en si peu de temps transporté dans un autre monde. J'avais à nouveau quatorze ans, dans la ville de Paris avec ma mère à côté de moi qui me demande de me concentrer d'avantage. Elle ne cessait de dire que c'est en forgeant que l'on devient forgeron. C'est donc en pianotant que l'on devient pianiste ? Je pense que oui. Un claquement de porte me fit sursauter et me sortis immédiatement de ma rêverie. Je revenais au monde réel, à ce bateau, à cette pièce. Je me retournai pour poser mon regard sur une jeune femme brune qui était entrée dans le prime de la veille. Nous n'avions pas encore eu la chance de discuter puisque j'avais été peu présent. Je me retournais, pour faire dos au piano et fixé un instant la jeune fille. Un sourire naquit sur mon visage qui se voulait chaleureux. « Bienvenue ici, j'espère que tu vas te plaire. » C'était simple, peu original mais c'est tout ce que j'avais trouvé pour le moment

Je commence à peine à prendre mes marques. Je tente en vain d'associer les visages aux prénoms que j'ai entendu au cours de la journée, ce qui n'est pas une tâche aisée pour moi, il faut dire que je ne suis pas très physionomiste. Je traine dans les couloirs à la recherche d'une quelconque occupation avant le souper. Mes doigts trainent sur les murs, comme pour mieux me souvenir de mon passage. Je me laisse surprendre par une mélodie. Plutôt agréable d'ailleurs. Je ferme les yeux, reconnaissant le bruit particulier et enivrant d'un piano. Je me laisse guider par les notes. Pour une obscure raison, j'ai toujours été fascinée par cet instrument. J'aurais voulu savoir jouer et aujourd’hui, je crois qu'il est trop tard pour moi, je dois me contenter de savourer les mélodies des autres. Je m'approche du but. Je pousse une porte, entre et la relâche malencontreusement. Elle claque en se refermant et stoppe le musicien.Mes doigts se soulèvent jusqu'à mes lèvres, embêtée de m'être montrée si peu respectueuse pour son travail. J'esquive un sourire, malicieux et enfantin. Je ne me souviens pas avoir vu ce jeune homme auparavant. Tout a été si vite, normale que je sois passé à côté de certain visage. Bienvenue ici, j'espère que tu vas te plaire. Je souris et viens me poser à côté de lui, sans la moindre gène. Je tourne le dos au piano. Je suis de profil par rapport à lui. Je n'en doute pas une seule seconde. Hm. Au fait, moi c'est Peps. Je lui tend la main avec assurance. Je laisse ensuite retomber ma main contre mon corps. Je détourne le regard. Le piano... Hm. je crois que c'est mon instrument préféré. Ça fait longtemps que tu joues?

La jeune fille vint s'asseoir à côté de moi. Tant mieux, j'adore la spontanéité et ça nous permettra de faire un peu plus connaissance. Je n'ai pas encore réellement beaucoup parler avec mes colocataires de croisière. Comme si je manquais de temps... Dingue quand on sait que je passe vingt-quatre heures sur vingt-quatre sur le même lieu de vie qu'eux tous. « Je n'en doute pas une seule seconde. Hm. Au fait, moi c'est Peps. » Peps, juste peps !? C'est bizarre non ? Est-ce que c'est autorisé par la loi de s'appeler ainsi. Je sais qu'avec un prénom comme le mien, je peux pas trop la ramener mais ... PEPS !? « Dis, il vient d'où ton prénom ? Tes parents était des fans de Pepsi et voulaient lutter contre Coca-Cola et sa mondialisation ? Ou alors ... Non je vois rien d'autre à vrai dire. » J'haussai les épaules devant mon inefficacité à trouver pourquoi elle se nommait ainsi. Je n'avais aucune autre explications dans mon esprit. Elle devrait m'en donner elle. Je sers la main qu'elle me tends et la re-dépose moi aussi. «Le piano... Hm. je crois que c'est mon instrument préféré. Ça fait longtemps que tu joues?» Joie. Je ne suis pas le seul paumé à aimer cet instrument. Enfin, je n'ai encore rencontré personne à bord avec qui je pourrais discuter piano alors 'peps' tombait plutôt bien. « J'en ai joué durant sept ans. Jusqu'à mon emménagement à New-York où mon père préféra que je me concentre sur mes études plutôt que sur l'art. Au grand regret de ma maman d'ailleurs. Je n'ai plus toucher à cette instrument depuis seize longues années. Je le découvre à nouveau ici ... Parce que chez moi, je n'ai pas le temps de m'y consacrer. » Le boulot, les gosses, mon ex-femme. Je dois leur consacrer tout mon temps avant de me le consacrer à moi-même. Je parle beaucoup. Trop. Elle ne doit certainement pas tout avoir écouter, mais tant pis. Je cesse mon petit monologue pour avoir une réponse de sa part. N'importe quoi me conviendrait, même un-hochement de tête, si cela signifie qu'elle ne part pas en courant.

Dis, il vient d'où ton prénom ? Tes parents était des fans de Pepsi et voulaient lutter contre Coca-Cola et sa mondialisation ? Ou alors ... Non je vois rien d'autre à vrai dire. Dis comme ça, c'était pire que tout, je préfère encore qu'on m'appelle Pepper-Ann, même si je détestais cela. Un grimace s'empare de mes traits. J'ai déjà un prénom pourri et je découvre que mon surnom était tout aussi pourri que le reste. L'espace d'un instant, je maudis mes parents pour leur originalité débordante. Puis, mes amis, pour m'avoir affublé d'un tel surnom. Et finalement moi, pour l'avir accepter sans broncher ni comprendre. En plus, je n'aime pas le Pepsi. Finalement, appelle moi Pepper-Ann. Enfin, si tu as une idée de surnom qui gère, je ne suis franchement pas contre. Oui, je ne supporte pas mon prénom, d'ailleurs, les gens ne l'utilisent que lorsqu'ils sont en colère après moi, c'est bien la preuve que personne ne l'aime, ce prénom. Je l'écoute parler du piano. Je le laisse parler, ce n'est que quand il se tait que je me permet de lui répondre. C'est dommage de ne pas trouver le temps pour les choses qu'on aime vraiment parce qu'un jour, on se retrouve avec ce temps que l'on a perdu d'une manière ou d'une autre, ce foutu temps qui veut nous rattraper, c'est là qu'on se rend compte qu'on aurait pu trouver le temps. Oula, ma pauvre Peps, tu t'égare dans des discours philosophiques un rien effrayant. Je souris alors, relevant mon regard vers lui, mes doigts viennent effleurer les touches du piano. Ici, le temps est avec toi, alors joue-moi un truc, n'importe quoi !!! Oui, c'est un ordre. Mais l'entendre parler du piano m'a fait comprendre à quel point on pouvait être passionné. J'aime le piano, mais pas comme lui. C'est fascinant. Au fond, c'est cet amour passionné que je veux connaître et partagé.

Bon, je devais certainement avoir des idées tordues en ce qui concerne l'idée de son prénom, d'ailleurs elle n'avait pas l'air d'adorer ce qui m'était passé par la tête. Pourtant, je trouvais que ma théorie se tenait suffisamment. Vu la grimace que je vois sur son visage, je peux même être sûr d'avoir dit quelque chose qu'il ne fallait pas. Je dois certainement être un peu trop franc et devrais penser à surveiller ce que je dis. Je souris à cette dernière, histoire de me faire un peu pardonné. Ma mère m'a toujours dit qu'avec un sourire comme le mien, je pourrais tout me faire pardonner alors dès que je peux, je tente. «Finalement, appelle moi Pepper-Ann. Enfin, si tu as une idée de surnom qui gère, je ne suis franchement pas contre» Joie, bonheur, tant de synonymes qui m'envahisse en ce moment même. Purée ! Cette fille a un prénom composé, comme moi. Je ne suis pas le seul dans cette foutue maison à avoir galérer pour apprendre à écrire mon prénom. Bon Charles-Emmanuel c'est encore plus long à écrire, mais quand même ! « Je te cherche un surnom et dès que je trouve, je t'en fais pas. Au fait, moi c'est Charles-Emmanuel, je fais parti de ton club ... Celui des prénoms composés. » Je riais doucement à ce que je disais. J'assume totalement de rire à mes propres paroles, je suis tellement drôle ... ou pas. «C'est dommage de ne pas trouver le temps pour les choses qu'on aime vraiment parce qu'un jour, on se retrouve avec ce temps que l'on a perdu d'une manière ou d'une autre, ce foutu temps qui veut nous rattraper, c'est là qu'on se rend compte qu'on aurait pu trouver le temps.» J'hausse des épaules devant cette fatalité qu'elle évoque. Mais quand on a une famille, notre plus grande passion devient celle-ci. Je pourrais tout sacrifier pour mes enfants. Mon père avait demandé que j'abandonne un peu l'art pour fonder quelque chose de plus sûr, faire des études et bosser pour lui. C'est ce que j'avais fait, je m'étais concentré sur les choses essentielles et vitales et au final, je le vivais bien. Je ne regrettais aucun de mes choix et était prêt à renoncer une nouvelle fois à la musique en sortant si cela était nécessaire. Mais si jamais, je m'autorisais à en pratiquer un, je le ferai avec plaisir. Un piano c'est vite acheté et puis ma guitare traîne toujours dans ma chambre. « Je suis d'accord, mais parfois la vie nous imposent d'autres priorités. » Cela était court et simple mais ça résumait parfaitement le fond de ma pensée. . «Ici, le temps est avec toi, alors joue-moi un truc, n'importe quoi !!!» Cette phrase me fit fortement plaisir, si il y a bien endroit où je pourrais retrouver du temps, c'était ici. Je n'étais pas venu ici pour cela, on est pas à la star academy mais ça me passe le temps, ça m'apaise et ça me fait voyager d'avantages encore. Mes doigts se pausèrent sur le clavier et jouèrent l'air qui se trouvait sur les partitions. (ici) Une nouvelle fois j'étais transporté dans un autre monde où l'imaginaire n'avait pas de limites et j'espérais bien y emmener la jeune fille. Je restais silencieux, concentré, mes doigts ne cessaient de bouger avec rapidité et précision.

Je suis d'accord, mais parfois la vie nous imposent d'autres priorités. D'autre priorité. Oui, j'oublie parfois que je ne peux pas saisir les choses comme la plupart des gens. Un boulot stable, une famille, un engagement. Je ne peux le comprendre, je ne l'ai jamais vécu. D'une certaine façon, je jalouse ses personnes qui ont d'autre priorité dans la vie que de simplement profiter de chaque seconde. J'ai grandis dans une famille nomade et très indépendante, nous nous aimons, mais nous n'avons pas besoin d'être les uns près des autres pour se le prouver. Je sais, cela peut vous paraître étrange, mais c'est ma famille. Petite, j'avais toujours dis que je ne serais pas comme mes parents. Finalement, je ne me suis pas vraiment trompé, je ne serais pas comme eux, tout simplement parce que je ne serais probablement jamais ce qu'est d'être mère. Je reste silencieuse. Je ne devrais pas avoir ce genre de pensée. Je me suis toujours promise de ne pas mettre le doigt sur ce que j'allais louper, mais plutôt sur ce que j'aurais accompli. La musique qu'il choisit n'arrange rien à la mélancolie qui me gagne doucement. J'ai le cœur qui se serre. J'ai peur que cela ne se voit de trop. Je pourrais jouer la carte de l'émotion engendrer par cette mélodie. Je le toise, je suis absence, je le regarde sans réellement le voir. J'essaye de me soustraire de mes songes. Je pince délicatement mes lèvres l'une contre l'autre. Raaah. Qu'est ce qui me prend. Je ne suis pas du genre à me laisser abattre. Et pourtant, ... C'est magnifique. Je murmure doucement alors que ses doigts cessent de touches le clavier.