MARILOU & DRAY

Trois heures du matin. Dray ne dormait pas, non, il tournait dans son lit depuis qu'il s'y était installé, c'est à dire il y a bien deux heures. Le pire, c'est qu'il ne ressentait pas la moindre pointe de sommeil. Il était là, les yeux grands ouverts, à compter moutons, chèvres et lapins. Bref, après s'être fait tous les animaux de la ferme, il se releva, se dirigeant dans la cabine de Pepper-Ann et compagnie. D'accord, d'abord son idée était de la réveiller, mais il se planta plus ou moins inconsciemment de lit, il était tard toussa. Ou alors il fit exprès, on ne le saura jamais. Tirant sur la couette sans précaution, le jeune homme plaqua sa main contre la bouche féminine pour éviter qu'elle nous réveille tout le bateau. Elle, c'était Marilou. Se penchant vers elle donc, il lui chuchota : « Je te kidnappe pour la nuit. » Ben quoi ? Il s'ennuyait, et s'il y a bien quelque-chose qu'il ne supporte pas, c'est l'ennui. « Rendez-vous dans cinq minutes devant la cabine, prends ton maillot de bain. Ou pas, en fait y en aura surement pas besoin. » Prochaine destination : la plage. Heureusement celle-ci était proche du yacht, ils y seraient rapidement. En attendant que la demoiselle endormie sorte du lit, il s'alluma une cigarette. Et si elle ne se décidait pas à venir ? Hum, il emploierait la manière forte, quitte à la porter jusqu'au lieu choisit.

Trois heures du matin, pour une fois que je me trouve dans mon lit et que je ne gambade pas gaiement dans le bateau, on ose, oui, on ose me réveiller. On tire sur MA couette de MON lit. Et, vous savez, comme dans les films d’horreur avant de vous étriper, on me plaque une main contre la bouche, histoire que je ne puisse pas alerter les autres d’un fou furieux psychopathe est sur le bateau. J’allais même crier à Jordanna que son quasi-copain-ou-je-sais-pas-quoi, aka monsieur Weasley, s’était trompé de lit et allait me violer, mais, je me suis rendue finalement compte que c’est juste Dray. Doux jésus. J’ai quand même échappé à la honte et je me suis retenue de gigoter partout. Me kidnapper ? Hein, que, quoi ? Bordel, il n’est pas trois heures du matin-là ? Qu’est-ce qu’il fout là lui d’abord ? Hum. J’ai l’esprit un peu en compote, parce que je viens juste de me réveiller, et la dernière fois que j’ai entendu « rendez-vous dans cinq minutes », c’était pour de la baise, donc y’a de quoi m’interroger. Mais je me rends compte que c’est pas du tout pour ça (et heureusement, parce que si on se met à me réveiller à cette heure-là pour baiser, je me poserai des questions quand même). Je ne sais pas tellement pourquoi, mais je me lève quand même. Histoire de voir. Après tout, je suis là pour m’amuser. Même quand on me réveille à trois heures du matin. Mon maillot de bain. Bordel, je sais pas du tout où j’ai pu le mettre. Ce qui pose potentiellement problème. Oh, puis zut. Il est trois heures du matin, alors, sans trop bien réfléchir, je sors tout simplement comme je roupillais. C’est-à-dire avec mon grand maillot superman, trois fois trop large pour moi. Et, je sors. Il est là. Avec une cigarette. Oh bordel. Ca fait depuis un moment que je n’en ai pas touchée une. Des années, à vrai dire. Oh, et puis zut pour le travail et le « je dois conserver ma voix ». Je suis en vacances. On va dire. « Passe-moi une clope. » Oh puis il me devait bien ça, avec le coup de la dernière fois dans la salle de bain avec Briony et l’odieux-connard-dont-je-ne-citerai-plus-jamais-le-nom. D’ailleurs, je me demande où est-ce qu’il veut aller. J’ai pensé à la piscine, à un instant, puisqu’il parlait de maillot de bain. Mais je penche plutôt pour la plage, puisque c’est la destination de la semaine. Soit, j’irais à la plage en maillot superman. Rien de choquant là-dedans. De toutes manières, j’ai perdu mon maillot de bain. Et le chercher serait long. Trèèès long. Puis zut hein, je n’ai pas la classe avec lui ? Oh que si. Soit. « Où est-ce qu’on va, alors ? »

S'encrassant les poumons à coup de tabac, Dray attendit patiemment que Marilou se prépare. Alors forcément il s'attendait à tout.. sauf à ca. Écarquillant les yeux exagérément, il la détailla des pieds à la tête d'un œil critique. D'une, elle sortait habillé, enfin, habillé était un grand mot dans ce cas, d'un espèce de maillot emprunté à un de ses exs obèse, et ensuite elle voulait lui taxer une clope ? Ca commençait bien. Bon, il faillit sortir l'excuse bidon qu'il n'en avait plus, mais vu que le paquet de cigarettes se laissait aisément deviner dans la poche de son short, il s'abstint de tout commentaire et s'exécuta. Après tout il l'avait sortit du lit à une heure tardive, il serait mal venu de venir râler. Il brandit son briquet et la laissa se servir sur la flamme. Il faut bien crever de quelque-chose. « Nous allons à la plage. » Annonca-t-il alors qu'ils quittaient le yacht dans la nuit, le plus naturellement du monde. Ces escales faisaient du bien, le bateau était grand, mais on en faisait vite le tour. Ils n'eurent qu'à parcourir un bon kilomètre pour parvenir au lieu choisit. Une immense plage, déserte. C'est bien pour ca qu'il adorait s'y rendre la nuit. Cette impression d'être seul au monde était grisante. L'attrapant par la main, Dray traina sa prisonnière jusqu'à quelques mètres de l'eau, avant de s'affaler sur le sable encore tiède. Il se laissa ainsi bercer pendant quelques instants par le bruit des vagues, ignorant le fait que s'étaler de la sorte avec une chemise parfaitement blanche n'était peut-être pas des plus appropriés. Enfin, il se redressa sur ses coudes et après avoir jeté un bref coup d'œil à la mer calme, reprit. « Bon, on va se baigner ou t'as peur que Superman prenne l'eau ? » Lui lança-t-il d'un air taquin, faisant évidemment allusion à son accoutrement.

Oui, j’avais la flemme de m’habiller. Et je ne trouvais pas mon maillot de bain. Ce n’est pas la fin du monde non plus hein. Puis merde. Il est classe mon maillot. La force de superman est avec moi bordel. Hum. Il semble hésiter à me passer une clope. Au pire, je lui saute dessus pour en prendre une. Non mais. Finalement, il s’exécute. Enfin, j’ai envie de dire. Punaise. Une clope. Ca faisait tellement longtemps. Et ça fait tellement du bien. On va donc à la plage. A cette heure, rien que ça. Quoi qu’en fait, ça me va tout à fait. Et la plage, la nuit, c’est super. On s’affale comme loques humaines sur le sable. Et mon regard vire automatiquement vers l’eau. C’est dingue comme ça peut être envoutant. Reposant aussi. Ça me donne envie de rester là le plus longtemps possible. Sauf qu’on change de destination toutes les semaines. Dommage. Pour ce coup-ci. J’en oublie presque que Dray est là en fait. Mais il me rappelle rapidement sa présence en parlant. Se baigner. Toh, oui, bonne idée. Je me relève, donc. Soit. Superman va devoir rester sur le sable. J’enlève rapidement le maillot, me retrouvant en quelques secondes en simples sous-vêtements. Je ne me fais pas de soucis pour Dray, puisque, de toute façon, il m’a déjà vue moins habillée hein. Je me mets à courir en direction de l’eau, et j’imagine que Dray ne devrait pas tarder à venir également. Forcément, ça devient difficile de courir une fois que l’eau m’arrive à un niveau assez haut alors je me laisse couler pour être trempée de la tête au pied. Putain, elle n’est pas super chaude hein. Quand je remonte à la surface, je me rends compte que je ne vois absolument rien. Normal, puisqu’il fait nuit. Et y’a un gros silence. Et je pense directement aux films d’horreur où la fille qui se baigne toute nue (sauf que je ne suis pas toute nue) se fait choper par le tueur et se fait lamentablement décortiquer. Tah. J’aurai jamais dû accepter de me baigner en pleine nuit dans une plage moi, on y voit rien, et on sait pas ce qu’il y a sous nos pieds. Et je vois même plus Dray. Je commence à flipper un peu. « Bordel t’es passé où » il a intérêt à me répondre. J’essaye de me calmer. C’est bête de paniquer pour ça. Enfin, pas si bête que ça, puisque j’suis allée je ne sais pas où, que j’ai plus pieds, qu’il fait nuit et que je ne vois toujours rien. Bordel.

Elle fonce comme une furie, et croit surement que Dray la suit. Ou pas. Non en fait, lui reste les pieds dans le sable, les bras croisés, et regarde la demoiselle rentrer dans l'eau. Juste histoire que dans l'hypothèse où elle reviendrait en hurlant car l'eau est trop froide, il ne s'y risque pas. Pas fou non plus. Une fois que le liquide avait atteint sa taille, et voyant que ca n'avait pas l'air si pénible que ça, le jeune homme se débarrassa enfin de ses vêtements, se retrouvant en boxer bleu ciel. Se précipitant dans l'eau, il couru pour ensuite plonger dans l'étendue salée. Quelques brasses plus tard, il s'était bien éloigné de la plage, et éloigné par la même de la lumière diffusée par les enseignes des commerces. Difficile de voir où se trouvait Marilou, hum, il aurait peut-être du lui demander si elle savait nager. Bougeant un minimum ses jambes afin de ne pas s'assourdir de ses clapotis, le garçon tentait de repérer la candidate grâce à l'ouïe. C'est dans ces moments qu'on regrette d'avoir passé sa vie à écouter de la musique au volume maximum. Soudain, il l'entend pester. Finalement, ils n'étaient pas si loin de l'autre. La rejoindre ? D'accord. Mais pas sans s'amuser un peu. Se laissant couler, il rejoint certes la demoiselle, mais en restant sous la surface de l'eau ; ne réapparaissant que juste derrière elle, posant ses mains sur les hanches féminines. « Juste là. » Un sourire se dessine, qu'elle ne peut pas voir, forcément. « C'est dangereux de nager seule en pleine nuit, on est jamais à l'abri de tomber sur une mauvaise rencontre.. ou une bonne. » Deux optiques. Soit, elle lui en foutait une pour lui avoir fait peur, soit, teeellement heureuse de ne pas être perdue en pleine mer, se pendait à son cou. Petite préférence pour la seconde. Mais au cas où, il se préparait à devoir arrêter son bras/genou.

Bordel, je n’aime pas ça. Il ne se passe absolument rien. Y’a du vide. Du silence. Exactement le contexte qui fait peur, vous savez. Enfin je trouve. Je scrute les alentours, mais je n’y vois vraiment rien. Dernière fois que je me baigne en pleine nuit. Je ne sais pas où il est. C’est le coup, il est reparti. Ou alors il s’est fait bouffé par une bête inconnue qui vaguait dans les eaux. Ou sauvagement assassiné par un malade mental traînant par-là. Hm. Et je manque de faire une crise cardiaque (dieu merci, j’ai jamais eu de problème de cœur) quand je le sens derrière moi (enfin j’ose espérer que c’est lui) et ne peut pas m’empêcher de pousser un petit cri tout en le repoussant violemment. Oui, bon, je réalise que c’est bien lui. Aah ouais, c’est dangereux de nager seule en pleine nuit ? Fallait pas me réveiller pour ça espèce de crétin. Non mais. « T’es vraiment con putain » Autrement dit « je te remercie de m’avoir foutu une grande peur ». Finalement, je retourne vers lui. Parce que plutôt crever que de me retrouver encore une fois seule là-dedans. Froussarde ? Légèrement. Mais avouez que c’est pas du tout rassurant de ne rien voir. Et ça rassure pas non plus quand je me mets à penser aux nombreux films d’horreurs où ça commence souvent comme ça, un bain de minuit, et paf, on crève lamentablement d’une façon ou d’une autre. Soit. Faut vraiment que j’arrête de me faire des films pour si peu moi. Pourtant, je vous assure que je n’ai pas connu de traumatisme en étant enfant. Enfin je ne crois pas. Je me raccroche alors à Dray. Question de survie. On va dire. « T’as franchement pas intérêt d’me lâcher hein »