Lust avait capté seulement le matin même l’existence d’un paquet d’endroits. Genre, la salle de cinéma, la piscine, la salle d’entraînement ou encore le cellier. Et encore, elle reste prête à parier, ce soir même, qu’elle n’a pas encore tout vu du chalet. La taille et le luxe de ce dernier restent tout de même impressionnants. Pour une nana comme Lust, en tout cas. Une grande motivation pour rester dans le jeu le plus longtemps possible en tout cas. C’est certain. Ce soir donc, dix-neuf heures trente, Lust décide de faire un tour dans ce fameux cellier. Elle prend son sac de fringues (ou plutôt son sac de tous les jours, remarquez, elle voyage léger Lust) puisque le cellier sert apparemment de laverie aussi. Elle pousse la porte et tombe nez à nez avec un autre candidat, bouteille à la main. Un rire s’échappe d’entre ses lèvres. « Tu comptes leur vider toute leur collection de vin ? ». Pour elle, du vin reste du vin. Peu importe que la bouteille soit aux alentours de 3000 euros, vous saisissez. Remarquez, elle ne s’doute même pas du prix de ces bouteilles-là. Elle pose son sac près d’une des machines à laver et, bien que ça n’soit pas dans ses habitudes, sert la main du type. Auggie. « Lust. » qu’elle répond, simplement. Elle ouvre son sac et fourre dans la machine toutes ses fringues. Mises ou non depuis le début du jeu. Remarquez, ça n’peut pas leur faire du mal, vu leur état d’origine. Un peu perplexe face à la machine, elle verse du produit au bon endroit (espérons pour elle), appuie sur un bouton, un peu au hasard, et, grand dieu, la machine démarre. Machine à laver ? Domptée. Tcheck. Elle s’assoit alors librement dessus, balance un peu ses jambes et repose son regard sur Auggie. Un étrange spécimen. « Et toi, qu’est-ce qui t’emmènes ici, mon cher Auggie ? Le vin t’as fait de l’œil ? » Visiblement oui.

Les autres pièces ne lui semblent pas si intéressantes que ça, à Auggie. C’est exactement l’inverse pour Lust. Pire qu’une petite fille, dans sa tête, lorsqu’elle met les pieds dans une nouvelle pièce. Elle est émerveillée. Vous comprenez, tout est beau ici. Tout est spacieux, luxueux. Propre. Tout l’inverse de ce que Lust a connu jusqu’aujourd’hui. Sauf la fois où elle était avec un gosse de riche. Mais sa maison ne surpassait absolument pas ce chalet. « Sais-tu ce que c'est ? » Lust hausse un sourcil, perplexe. A ses yeux, il ne s’agit que d’une simple bouteille de vin. Ni plus, ni moins. Et puisqu’elle ne boit pas de vin, vous voyez, elle ne s’y préoccupe pas énormément non plus. Un sourire amusé se dessine néanmoins sur son visage lorsqu’il décrit les caractéristiques de la bouteille. Trois milles euros. Pour seulement une bouteille. Oh, bordel. Auggie formule ce qu’elle-même pourrait faire, avec cet argent. « Je serais curieuse de savoir combien de zéros comporte ton compte en banque. » Parce qu’avec ses connaissances, Lust l’assimile tout de suite à quelqu’un de cultivé. Et donc qui a les moyens de l’être. Ensuite, le candidat l’interroge sur ses fringues. Lust réfléchit rapidement à une réponse qui n’étale pas trop sa vie. Comprenez qu’elle n’est pas là pour parler d’elle. Et encore moins pour entendre la vie des autres. « Bien sûr que non. Mais on va dire que j’ai eu un problème, tu vois. Et mes fringues n’étaient pas toutes propres, du coup. Alors j’en profite. » On va dire ça comme ça.

« Un bon nombre de zéro qui régulièrement se vide pour aller vers d'autres personnes. » Auggie a de la chance, visiblement. Il peut se permettre de distribuer aux autres. « Riche et généreux. C’est touchant. Tu dois être l’homme parfait pour pas mal de nanas j’imagine. » qu’elle réplique, avec un sourire narquois. Vient ensuite l’une des autres questions fréquemment posées en début de jeu. « Tu penses vraiment avoir plus de chance de tomber amoureux dans ce jeu qu’à l’extérieur ? » Ouais, avouons-le, Three Wishes, c’est un peu le jeu ‘attrape-couillons’ pour Lust. Et, avouons-le aussi, c’est sans doute la même chose pour la production. Au fond, ils ne cherchent que de l’argent, non ? L’amour des candidats, en quoi ça pourrait les intéresser ? Même un site de rencontre serait plus efficace qu’une télé-réalité. « L’amour, c’est qu’un prétexte. » pour tout le monde, presque. « T’as l’air de t’en douter, mais ouais, je suis plutôt là pour le fric qu’on peut gagner. C’est une grosse somme. » Certes. Après, Lust n’est pas « fermée » à l’amour non plus. Ce serait plutôt un gain supplémentaire qu’autre chose. « Après, j’suis pas des plus stupides hein, y’a peu de chance pour que je remporte le gros lot. Mais être ici, c’est tout de même mieux qu’être à l’extérieur. » Carrément. Opportuniste ? On crache par sur un chalet de cette envergure.

Lust, elle ne comprend pas les gens qui font vraiment ce jeu pour l’Amour. Pas qu’elle soit une romantique invétérée, non, mais, pour elle, lorsqu’on tombe amoureux, on n’y peut vraisemblablement rien. A voir si on peut s’en réjouir ou non, après, mais les faits sont là, on ne choisit pas vraiment. D’autant plus qu’Auggie est jeune, c’est sans doute un peu trop tôt pour déclarer forfait et se réfugier dans une émission de télé-réalité. Et quoi, s’il ne trouve personne ici ? Ce serait si terrible ? Ouais. Elle ne pigera jamais ça. Mais elle n’est pas d’humeur à batailler, ni à exposer ses arguments, et encore moins à écouter les siens, rien. Et visiblement, le candidat non plus. Suite à sa dernière réplique, Auggie, lui, on dirait qu’il a capté un truc. Il fronce les sourcils. Un peu mal à l’aise, sur le coup. Merde. C’est elle qui fout mal à l’aise, en général. Pas l’inverse. Et puis c’est bien mieux dans ce cas-là. Elle s’y attendait bien, de toute façon. Même si elle va peut-bien ne rester qu’une semaine ici, elle se serait bien faite captée, à un moment. Suffit de voir la tronche de ses fringues. Ou de voir ses deux sacs. Qui sont aussi ses sacs ‘au quotidien’. Lust se surprend à lorgner sur les nombreuses bouteilles au lieu de regarder le candidat, répond un simple « ouais, ouais » lorsqu’il affirme ce qu’elle a dit précédemment. Il lui demande son âge. Elle repose ses yeux sur lui. Merde. Il a pitié d’elle. Comment voulez-vous être un minimum crédible dans votre rôle lorsqu’on a pitié de vous ? Impossible de se balader la tête haute, impossible de rester aussi sûr de soi-même. « Vingt-deux ans. » qu’elle répond, quelques secondes après. L’ennui, quand on est mal à l’aise (et dieu sait que c’est rare pour Lust), c’est que le silence même nous achève. Généralement, Lust, elle prône les biens faits du silence. Comprenez qu’elle préfère ça plutôt qu’entendre des stupidités d’autres personnes. Mais dans le cas présent, elle tenterait plutôt de le fuir, le silence. Elle vire paranoïaque et se pose trop de questions rapidement, vous savez, dans ce cas-là. « Alors … l’aventure te plait, pour l’instant ? Genre, t’as rencontré des gens qui t’semblent un minimum intéressants ? »

Changement de sujet. Dieu merci. Lust, elle se dit qu’il va falloir qu’elle trouve un truc. Parce qu’être mal à l’aise pour si peu, vous voyez, elle n’apprécie pas particulièrement s’afficher en tant que « faible », si on peut dire. Elle préfère largement avoir un avantage sur les gens qui l’entourent. Histoire d’être sûre d’avoir une quelconque longueur d’avance. C’est toujours mieux dans ce cas-là. Soit. Ainsi, Auggie est plutôt heureux du jeu, pour l’instant, qu’il qualifie « d’intéressant ». A voir sous quel point de vue, alors. Mise à part se la couler douce dans ce chalet, Lust ne voit absolument rien d’intéressant dans ce jeu. Remarquez, ça viendra peut-être avec le temps, qui sait. Les gens sont intéressants, qu’il dit. Pas tellement convaincue, Lust. Pour l’instant, encore une fois. Il cite Indiana et Hortansia. Un fin sourire se dessine sur le visage de Lust. « J’ai surpris Indiana en train d’essayer la robe de je-ne-sais-plus-qui. C’était amusant, j’dois dire. » Dans le genre de comportement assez louche, on ne fait pas mieux. Quant à Hortansia, elle la connait aussi, vaguement, bien sûr. Elle lui a filé une clope. Elles ont échangé quelques mots. Et c’est à peu près tout. Très peu pour dire de la candidate qu’elle est particulièrement intéressante. Et puis, Lust entend son propre prénom. Ce qui lui vaut un léger sourire. Intrigante ? Pas tellement, quand on regarde bien. Pas tellement intéressante non plus, dans le fond. « Forcément, comment veux-tu ne pas te plaire ici. Y’a même une piscine souterraine, une salle de cinéma et tout. C’est hallucinant. » Ouais, ouais, le départ sera difficile – sauf si elle gagne, remarquez.

« J’ai surpris Indiana en train d’essayer la robe de je-ne-sais-plus-qui. C’était amusant, j’dois dire. » Elle avait pu donc rencontrer la fille aux cheveux roses. Je souris à son commentaire mais elle ne semblait pas convaincu qu'elle pouvait être qualifié d’intéressante pour le moment en tout cas. Le mystère à tendance à m'attirer et à m'intéresser plus que de raison. Mais ça ne semble pas être son cas. « Forcément, comment veux-tu ne pas te plaire ici. Y’a même une piscine souterraine, une salle de cinéma et tout. C’est hallucinant. » Elle réponds à ma question et ne fait pas de commentaire sur le faite que je la trouve intéressante ce qui me fait tiquer. « C'est vrai que c'est plutôt cool. » dis-je d'une voix neutre alors que mon regard la détail et tente de la comprendre. Elle semble avoir une piètre opinion d'elle même. « Tu ne te trouves pas intéressante ? » dis-je tranquillement la détaillant toujours. Je suis conscients que ça peut mettre mal à l'aise mais j'ai besoin de regarder la moindre de ses mimiques pour pouvoir comprendre ce qui se trame dans sa petite tête. Je lui souris tout de même histoire de ne pas trop la mettre mal à l'aise. Je pense que ça lui ferait pas de mal qu'elle se voit à travers mon regard, rien de négatif elle peut en être certaine.

‘Plutôt cool’ est un euphémisme, dans une situation pareil. Enfin, pour Lust. Remarquez, pour Auggie, c’est sûr que c’est différent vu le compte en banque qu’il possède. Le chalet ne doit pas l’impressionner. Il a dû en voir d’autres, des endroits de ce genre. Il habite sans doute même dans quelque chose de mieux que ce chalet. Forcément. Et puis, il pose une question relativement étrange, pour Lust en tout cas. Le genre de question qu’on n’entend pas souvent, au fond. Remarquez, ça change des questions lassantes qu’on entend à chaque rencontre ici. Lust reste silencieuse, quelques instants. Question piège, vous voyez. Finalement, un rictus se dessine sur son visage, avant qu’elle n’ouvre la bouche. « Je me suis jamais posée la question, tu vois. » Une manière d’éviter d’y répondre clairement, remarquez. Elle ne saurait pas quelle réponse donner, de toutes manières. Elle a beau classer, juger, critiquer chaque personne passant près d’elle, elle a beau dire que les gens, justement, sont rarement intéressants et ne méritent que trop peu une attention particulière, elle n’a jamais été foutue de trouver pourquoi elle serait plus intéressante qu’eux, au fond. Et , ouais, à bien regarder, elle préfère ne pas trop y réfléchir. Ce serait un coup à s’flinguer, cette histoire. Finalement, elle reporte son regard sur Auggie. « Parce que tu te trouves intéressant, toi ? »