Saoirse

Même si j'étais parfaitement conscient des dangers que représentait le tabac et du fait que celui-ci était plus nuisible qu'autre chose, cela ne m'empêchait pas de fumer régulièrement, environ deux à trois fois par jour. Mais c'était avant tout un réel besoin, car personne ici n'était plus stressé de nature que je l'étais. La cigarette me permettait de me relaxer quelque peu, d'oublier la source même de mon stress. Ce mercredi après-midi, je m'étais donc rendu sur la pergola, seul endroit où nous étions autorisés à fumer. Je pris place sur le canapé et sortis alors mon paquet de cigarettes duquel je tirai l'une d'elles, avant de me saisir de mon briquet et de l'allumer. Pfoouu, une bonne cigarette faisait tout de même beaucoup de bien. Je tournai la tête histoire d'admirer le jardin et la pelouse verte de celui-ci. Quand je fumais, mes pensées étaient ailleurs, je m'évadais vers des contrées lointaines. J'en restais imperturbable. C'était comme si rien ne pouvait me déranger ni n'interrompre. Mais peut-être avais-je parlé trop vite...

Ce n’est franchement pas l’envie qui me manque. J’ai véritablement l’objectif d’arrêter de fumer, je le promets, mais c’est tellement compliqué. Quoique je dis ça, mais j’ai bien réussis à la faire pendant neuf mois quand même, donc je sais que j’en suis capable. Pourtant, assise à la table, face à ce paquet de clope, je ne peux pas résister à leur appel. ‘Fumes-moi fumes-moi fumes-moiahah !’ qu’elle me chantait. Comme si s’était humaine possible de résister à cet appel. Nous n’avions pas le droit de fumer à l’intérieur, ce qui ne me gêne pas vraiment, puisque j’avais l’habitude de le faire à l’extérieur de chez moi, pour ne pas polluer l’air de mon chez moi. Je sortais sur la pergola, qui avait été aménagé pour les probables fumeurs du chalet. Cigarette entre les lèvres, je tournais la tête pour voir un jeune homme déjà présent sur le canapé. Il avait l’air… absent. J’allais le faire revenir parmi nous. J’attrapais ma cigarette pour ne pas la faire tomber, avant de courir dans sa direction et bondir sur le canapé, à côté de lui, le bousculant un peu au passage. « Hé hé hé, tu dors ? » Lui demandais-je, d’une petite voix amusée. J’observais son visage, mes deux grands yeux ouverts, le visage complètement illuminé par ce sourire qui ne voulait s’échapper de mes lèvres. « Est-ce que tu pourrais me prêter ton briquet, s’il te plait monsieur ? » Je lui donnais un léger coup de coude, avant de lui montrer ma cigarette. C’est qu’il avait l’air… timide (?) ce môsieur.

Fumer. Une délivrance, un moyen de m'échapper de la réalité et de ma petite vie merdique. Je savais que le tabac, sur le long terme, ne garantissait pas franchement une grande espérance de vie mais qu'importe, si cela pouvait me faire oublier mes soucis le temps d'un instant. Je m'étais donc rendu sur la pergola et m'étais assis sur le canapé avant d'allumer une cigarette. Rien de bien extraordinaire en fin de compte. Mais alors que je me perdais déjà dans mes pensées, le saut aussi inattendu que surprenant d'une demoiselle sur le canapé où j'étais assis me fit très vite revenir à la réalité. « Hé hé hé, tu dors ? » Tout sourires, la demoiselle ne se rendit même pas compte à quel point elle m'avait fait peur. J'avais juste frôlé l'arrêt cardiaque. « Gnééé, quoi ? » Il me fallu quelques secondes pour retrouver ma lucidité. « Est-ce que tu pourrais me prêter ton briquet, s’il te plait monsieur ? » Ah, elle voulait mon briquet. Donc c'était aussi une fumeuse. Ni une ni deux, je lui tendis donc l'objet convoité avec un léger sourire au coin des lèvres. « Hum. Voilà pour vous... jolie... demoiselle. » Déjà je ne me souvenais plus de son nom, ensuite j'étais quelque peu déstabilisé par la beauté de la jeune femme, dont les cheveux roux étaient en passe de me faire rêver. J'aimais beaucoup les rouquines, c'était un fait. Bientôt un sourire béat remplaça mon sourire en coin. Je ne devais pas avoir l'air idiot, hein.

J’avais un peur l’air conne à lui montrer ma cigarette, mais si c’était la seule manière pour moi de lui signifier ce que je voulais et ça fonctionnait plutôt bien en plus. « Hum. Voilà pour vous... jolie... demoiselle. » J’approchais mes doigts des siens, prenant agilement son briquet entre mes doigts. « Meeeerci beaucoup ! » lui répondais-je, en lui adressant un clin d’œil. Oui oui, j’avais bien relevé son petit compliment subtil et je trouvais plutôt ça mignon. Je l’appréciais déjà ce mec. Il est plutôt chou. M’enfonçant un peu plus dans le fauteuil, je posais ma cigarette entre mes lèvres, pour l’allumer. Instinctivement, je me retournais de nouveau vers lui, pour lui rendre son briquet ; si je ne le faisais pas maintenant, j’allais m’amuser avec la flamme et lui griller tout son gaz et après je devrais m’excuser sur le fait que j’ai tout utilisé et qu’avec ma tête en l’air, j’ai oublié de prendre mon briquet à moi. Ca serait vraiment chiant comme situation. Mes yeux se posèrent sur lui et un rire s’échappa de mes lèvres. Il était là, à me reluquer comme je-ne-sais-quoi, un sourire béat sur le visage. Je n’attendais pas qu’il reprenne son briquet et je le reposais moi-même sur ses genoux. Puis je repliais mes genoux sur le canapé, pour m’asseoir en tailleur. Penchée sur lui, je lui demandais à voix plus basse : « Rassure moi, ce n’est pas un pétard ? Parce que t’as franchement l’air shooté là ! » Je ne lui parlais pas sérieusement évidemment, bien que ça ne m’étonnerait et ne me dérangerait pas de m’en fumer un… oh lala il faut que j’arrête là. Je suis censée arrêter de fumer et en plus je ne suis pas une droguée. Je tirais un coup sur ma cigarette, expulsant la fumée sur le côté. « Tu sais, il ne faut pas m’en vouloir. Je suis un peu du genre à bouger tout le temps, j’arrive jamais à me concentrer sur un truc. Je déborde d’énergie, mais ma capacité à retenir les prénoms est en panne ! Alors c’est un peu un problème parce qu’on est beaucoup ici quand même et comme je ne compte pas m’en aller dès la première semaine, et bah, je veux tous vous connaître sans vous vexer alors… Ouai, tout ça pour te dire que je ne sais plus comment tu t’appel ! » Je parlais en faisant de petits gestes, sans prendre une seule fois ma respiration, si bien que j’en étais essoufflée à la fin. Je tirais de nouveau sur ma cigarette, lui adressant un nouveau sourire.

« Meeeerci beaucoup ! » Elle se saisit de mon briquet pour allumer sa cigarette avant de me rendre celui-ci. Par ailleurs, admirant la belle rousse, je prenais un air de gentil idiot qui me caractérisait plutôt bien. D'ailleurs, cela fit rire la demoiselle, visiblement intriguée par la tête que je faisais. « Rassure moi, ce n’est pas un pétard ? Parce que t’as franchement l’air shooté là ! » Même si n'importe qui aurait vu là une remarque pas du tout sérieuse et visant plus à détendre l'atmosphère, je pris celle-ci au premier degré, gêné. « Heu... non, non pas du tout. Je... je suis pas shooté, non. » D'accord, je ne devais pas avoir l'air très futé là tout de suite, mais c'était la jeune femme qui me mettait dans cet état là. Je ne restais franchement pas insensible à son sourire. Celle-ci apportait un vrai rayon de soleil de par sa présence. « Tu sais, il ne faut pas m’en vouloir. Je suis un peu du genre à bouger tout le temps, j’arrive jamais à me concentrer sur un truc. Je déborde d’énergie, mais ma capacité à retenir les prénoms est en panne ! Alors c’est un peu un problème parce qu’on est beaucoup ici quand même et comme je ne compte pas m’en aller dès la première semaine, et bah, je veux tous vous connaître sans vous vexer alors… Ouai, tout ça pour te dire que je ne sais plus comment tu t’appel ! » Bon dieu ce qu'elle pouvait parler vite. De tout ça, je n'avais finalement retenu que le fait qu'elle ne connaissait pas mon prénom. Bien. Souriant, je décidai de révéler celui-ci à la belle rousse. Le contraire aurait été étonnant, non ? « Dimitri, c'est Dimitri. Quant à moi je... je sais que ton prénom sonne vachement irlandais mais, hum, impossible de m'en souvenir non plus. » Irlandais ou pas, le prénom de la demoiselle m'était tout bonnement sorti de la tête. Je comptais donc sur elle pour me le redonner. Pendant ce temps je tirai une bouffée de ma cigarette, réalisant ô combien je pouvais être ridicule, en ce moment même. Pour ne pas changer...

« Heu... non, non pas du tout. Je... je suis pas shooté, non. » Je ne pouvais pas m’empêcher de le regarder avec un sourire amusé. Je ne me moquais absolument pas de lui, mais il était si… je n’avais même pas d’adjectif pour le qualifier. Je ne voulais pas qu’il se braque sur lui-même et maintenant il était tout gêné, le pauvre. Je lui filais une petite tape sur l’épaule. « Je rigole mon gars, il ne faut pas être tout gêné comme ça ! » Lui disais-je, en approchant un peu mon visage du sien pour le regarder bien dans les yeux. « Surtout avec moi hein ! » Ajoutais-je avec une petite moue et les sourcils froncés. Non, mais c’est vrai, je n’ai pas envie d’être intimidante, surtout que je ne l’étais pas le moins du monde en plus. Je ne voyais pas en quoi je l’étais. Peut-être que le fait que je sois une pile électrique pouvait faire peur parfois, mais quand même. D’ailleurs, le monologue que je venais de lui lâcher, avait peut-être tout pour être effrayant. C’est que, quand je suis partie sur ma lancée, on ne peut plus m’arrêter. Tout ça pour lui dire que je suis parfois incapable de rester concentrée assez de temps pour retenir un malheureux prénom qui, j’en suis sûre, est super facile à retenir en plus. Attendant une réponse de sa part, je tirais une nouvelle bouffé de ma cigarette, tournant toujours ma tête pour lui éviter la fumée dans la gueule. « Dimitri, c'est Dimitri. Quant à moi je... je sais que ton prénom sonne vachement irlandais mais, hum, impossible de m'en souvenir non plus. » Mon sourire déjà bien présent, s’étendit encore un peu plus. C’est qu’il avait tout de même une bonne mémoire, puisqu’il avait repéré mes origines. Je suis tout de même née en Irlande et mon prénom sonne pire encore que ‘vachement irlandais’. Alors il s’appelait Dimitri… ouai non, en fait je ne le savais absolument pas. J’avais peut-être entendu vaguement son prénom lors d’une conversation, mais vraiment vite fait. « C’est vrai. Je m’appelle Saoirse, S-A-O-I-R-S-E. » J’épelais mon prénom. Pas parce que je le prenais pour un débile, mais parce qu’on me demande souvent de le faire. Bah ouai, parce que ce prénom ne se prononce pas vraiment comme il s’écrit. « Enchantée ! » Je calais de nouveau ma cigarette entre mes lèvres, pour lui présenter ma main, qu'il devra obligatoirement serrer pour sceller notre présentation officielle. Quand même, il faut bien ça ! « Alors, j’ai un prénom irlandais… en plus je suis rousse. Ce n’est pas compliqué de deviner mes origines… mais Dimitri ! DIMITRI QUOI ! Ca vient d’où ? J’imagine que ce n’est pas Américain ! » Notez que j’essayais un peu de me calmer. Un petit peu, juste ce qu’il faut pour ne plus le gêner. Je crois que c’était peine perdue, mais qui ne tente rien n’a rien.

« Je rigole mon gars, il ne faut pas être tout gêné comme ça ! » J'eus droit à une tape sur l'épaule, qui ne m'aida pas pour autant à me relaxer. Et puis, d'un coup, la rouquine approcha son visage du mien ce qui immédiatement me fit avoir un mouvement de recul. « Surtout avec moi hein ! » Wow, j'ignorais si elle se voulait rassurante ou si au contraire elle me mettait en garde, toujours était-il que je n'en demeurais que plus mal à l'aise encore. « Je... d'accord. » D'accord à quoi, ça même moi je l'ignorais. Par ailleurs après avoir révélé mon prénom à la jeune femme, j'avais sous-entendu que le sien, même sans m'en rappeler, sonnait "vachement irlandais" d'après mes souvenirs. « C’est vrai. Je m’appelle Saoirse, S-A-O-I-R-S-E. » J'avais limite envie de me saisir d'une feuille et d'un crayon pour le noter, par peur de l'oublier. Non aucun risque, j'allais forcément m'en souvenir. « Enchantée ! » Sur elle me tendit la main, main que je saisis comme pour officialiser je ne sais trop quoi. « Moi... moi de même. Enchanté Saor... Saio... Saoirse. » C'était laborieux, hm. Mais oui, j'étais enchanté de rencontrer une jeune femme si charmante, même si elle ne me mettait pas forcément très à l'aise dans l'immédiat. Avec un peu de chance les choses seraient amenées à changer quand on se connaîtrait un peu mieux. « Alors, j’ai un prénom irlandais… en plus je suis rousse. Ce n’est pas compliqué de deviner mes origines… mais Dimitri ! DIMITRI QUOI ! Ca vient d’où ? J’imagine que ce n’est pas Américain ! » Par là je compris alors que Saoirse cherchait à connaître mes origines. Ma foi la meilleure chose que je pouvais faire était encore de les lui révéler, non ? « Je... je viens de Yougoslavie mais suis arrivé en Amérique il y a... hum... quinze ans je dirais. Je suis donc naturalisé et... je fais tout pour vaincre cet accent que je n'ai d'ailleurs quasi... quasiment plus. » Réduire mon accent m'avait demandé des efforts considérables mais à l'heure actuelle on devinait à peine que je n'étais pas Américain de naissance. Je ne dénigrais pas pour autant mon pays d'origine, loin de là. Seulement je vivais en Amérique et me sentais parfaitement Américain depuis ma venue dans ce pays. Saoirse venait d'un pays anglophone à la base, ce qui n'était pas mon cas.

Une veine que je n’étais pas du genre timide, stressée ou je ne sais pas quoi encore, sinon nous étions dans le caca. Franchement, il était d’accord pour ne pas être gêné avec moi, mais j’avais l’impression qu’il l’était encore plus en me l’assurant. Ce n’était franchement pas gagné. Il me serra tout de même la main, ce qui me fit largement sourire : au moins, il n’avait pas peur du contact ; enfin de ce simple contact. C’était déjà un bon début et il pouvait bien se rassurer, je ne comptais pas lui sauter dessus. « Moi... moi de même. Enchanté Saor... Saio... Saoirse. » Je lâchais un rire, à l’entendre butter sur mon satané prénom. Loin de moi l’idée de me moquer de lui, je constatais simplement avec joie que, la plupart des gens galéraient avec celui-ci, que se soit pour la prononciation, ou pour son écriture. Dans un sens, c’est un peu ma signature. Je sais que peu de personne portent ce même prénom, même en Irlande d’ailleurs. En tout cas, aux Etats-Unis, je me sentais unique. Mais je n’étais pas la seule ici, à avoir un prénom atypique et loin d’être américain. Dimitri. Je le voyais bien d’un pays d’Europe de l’Est, la Russie ou un truc du genre. « Je... je viens de Yougoslavie mais suis arrivé en Amérique il y a... hum... quinze ans je dirais. Je suis donc naturalisé et... je fais tout pour vaincre cet accent que je n'ai d'ailleurs quasi... quasiment plus. » Je me remettais à fumer, tandis qu’il parlait, tout en secouant subtilement la tête de haut en bas. C’est vrai qu’il n’avait pas véritablement d’accent, bien que j’aie maintenant une petite raison de croire que ses hésitations venaient de là. « Ca doit être vraiment vraiment vraiment vraiment difficile de perdre son accent ! » Lui disais-je, alors qu’il venait de le confirmer de lui-même. Je tirais sur ma cigarette, tout en penchant un peu ma tête et haussant légèrement les épaules. « Je suis en Amérique depuis plus longtemps que toi alors ! Je suis née en Irlande, mais on ne m’a même pas laissé le temps d’attraper l’accent irlandais. J’avais quelques mois quand j’ai atterri à Atlanta. » Oui, à peine six mois, pas plus. Au final, je ne connaissais presque rien de mon pays natal. Mis à part mon prénom et mon nom de famille, rien ne pouvait laisser entrevoir que j’étais née au pays des buveurs de bière. Bref, je n’avais pas franchement envie de m’étaler sur le sujet, ou sur ma vie, ou sur la sienne aussi. Enfin si, je voulais savoir pourquoi il était partit de son pays ; pourquoi il participait à 3W. Une question qu’il doit se poser aussi à mon encontre. Je souriais à pleines dents, bougeant mes fesses pour me remettre face au jardin. « Dis, tu sais faire des ronds de fumée ? »

« Ca doit être vraiment vraiment vraiment vraiment difficile de perdre son accent ! » Oh oui ça l'était. Cela m'avait demandé pas mal d'efforts et ce durant de nombreuses années. Je n'avais pas forcément honte de l'accent qui était le mien, seulement j'avais essayé de paraitre le moins étranger possible afin de m'intégrer au sein d'une société que je connaissais encore peu. Tandis qu'elle tirait une nouvelle bouffée de cigarette et que je fis de même, la belle rousse continua. « Je suis en Amérique depuis plus longtemps que toi alors ! Je suis née en Irlande, mais on ne m’a même pas laissé le temps d’attraper l’accent irlandais. J’avais quelques mois quand j’ai atterri à Atlanta. » En effet, elle était arrivée en Amérique étant très jeune, tandis que mes parents avaient attendu le début de mon adolescence pour m'y emmener. « On.. on a donc au moins deux points en... commun : on fume et on vient tous deux d'un... d'un autre pays. » Mine de rien ça comptait, du moins à mes yeux. Je n'étais donc pas le seul étranger ici, bien que la rousse n'avait rien gardé sinon ses cheveux et son nom de ses origines Irlandaises. Un sourire vint étirer mes lèvres à nouveau, mais un sourire moins timide cette fois. Saoirse, dont j'avais encore un peu de mal à prononcer le nom, s'adressa une nouvelle fois à moi après s'être tournée vers le jardin. « Dis, tu sais faire des ronds de fumée ? » Je ne m'attendais pas franchement à ce qu'elle en vienne à me poser cette question, mais soit. « Hum... non. En fait, j'ai ja... jamais cherché à en faire. » Il était vrai que l'idée ne m'était jamais venue de faire des ronds de fumée, même si j'avais déjà eu l'occasion de voir certaines personnes en faire. « Et toi tu... tu sais en faire je présume ? » C'était en effet ce que je pensai sur le coup, sinon pourquoi m'en aurait-elle parlé ? J'avalais ensuite ma salive, prêt à lui poser une question à mon tour. Il ne fallait pas que ce soit toujours elle qui soit chargée de cette tâche-là tout de même. « Et sinon, heu... Tu... tu recherches quoi comme type d'homme ? ou de femme, je... HUM. » J'en devins alors tout confus. Je ne savais en fait rien de ce qui attirait véritablement la rouquine. Je ne devais pas avoir l'air d'un abruti d'un coup... J'eus la soudaine envie de me cacher dans un trou de souris et de ne plus jamais en sortir.

« On.. on a donc au moins deux points en... commun : on fume et on vient tous deux d'un... d'un autre pays. » Je levais légèrement le menton en regardant en l’air : vu comme ça, c’est vrai que j’étais déjà à deux points communs avec Monsieur Dimitri. Je secouais la tête en signe de oui. Ca me faisait rudement plaisir d’ailleurs et ça se voyait au sourire qui ne quittait plus mon visage depuis quelques minutes. Peut-être que maintenant, il sera moins tendu comme un string avec moi que maintenant ; quoique, en voyant le sourire qu’il m’adressait – je le prenais comme ça – j’avais l’impression qu’il se détendait enfin. J’en profitais alors pour passer du coq à l’âne, parce que c’est aussi comme ça avec moi. Je suis capable de parler de tout et de rien, sans forcément suivre une conversation normale. S’il veut continuer à me parler, qu’il prenne immédiatement à partir de maintenant l’habitude. « Hum... non. En fait, j'ai ja... jamais cherché à en faire. » Ce n’est pas vrai ! Tous les fumeurs avaient cherché à le faire au moins une fois ! Je feignais la déception, tandis qu’il me demandait si je savais en faire. J’agitais mon index devant moi sans parler, tout simplement pour lui dire t’attendre. Je tirais sur ma cigarette puis, essayant de garder mon sérieux, je formais un « o » avec ma bouche. Puis faisant comme si je toussais, un premier rond sortit d’entre mes lèvres, suivi d’un deuxième et d’un troisième qui ne ressemblait à rien (ou à tout sauf à un rond). Je lâchais un rire, en tournant ma tête dans sa direction. « J’adore faire ça ! Je t’apprendrais si tu veux ! » Lui disais-je, en lui donnant un petit coup de coude amical. Mon regard plongea alors subtilement dans le sien. J’avais l’impression qu’il cherchait à me dire quelques choses, mais qu’il n’y arrivait pas. J’attendais alors, un mince sourire en coin et mes sourcils légèrement relevé. Oui oui oui, il se lança : « Et sinon, heu... Tu... tu recherches quoi comme type d'homme ? ou de femme, je... HUM. » Sur le coup, je dû avoir une expression étonné, accompagnant un léger rire lâché à vive allure. Je ne m’attendais franchement pas à cette question, surtout venant de la part d’un mec aussi timide que lui (c’est ce qu’il me donnait l’impression d’être). Passé l’étonnement, je mordillais ma lèvre inférieure, tandis qu’il devenait presque tout rouge. « T’es bien curieux toi, tout d’un coup ! » Lâchais-je naturellement, genre en le grondant un petit peu. Bonté divine, j’allais encore plus le rendre mal à l’aise. Je me reprenais alors plutôt rapidement : « D’homme ! Quelqu’un d’aussi fou que moi. Ou quelqu’un qui me supporte. Si un mec réussi à canaliser mon énergie et ma langue, ça serait vraiment la cerise sur le gâteau ! Et qu'il aime les enfants aussi. Et puis il faut qu’il soit drôle, optimiste comme moi, dynamique, sportif, protecteur aussi ! Sinon physiquement je m’en fiche. Black, blanc, blond brun… Il peut même être roux ! » Disais-je en riant. Bah ouai, bah ouai, on dit que les roux ça puent, mais moi j’aime bien les roux. On ne se demande pas pourquoi ! Je lui adressais un sourire freedent. S’il ne s’enfuyait pas en courant là ! « Faut me dire ‘ta gueule’ quand je parle trop ! Parfois ça marche… Parfois ! » J’haussais les épaules, avant de me rapprocher un peu de lui. « Et toi ? Femme ou homme ? Brune, blonde ouuuu rousse ? Dis-moi tout ! »

Je n'avais pour ainsi dire jamais cherché à faire des ronds de fumée, jamais. Alors forcément, lorsque le sujet était venu dans la conversation, j'avais immédiatement demandé à Saoirse si elle savait en faire. En guise de réponse, la belle rousse en exécuta trois, bien que le dernier ne ressemblait pas franchement à un rond mais on pouvait lui pardonner. Elle se mit ensuite à rire, avant de rétorquer « J’adore faire ça ! Je t’apprendrais si tu veux ! » J'eus même droit à un coup de coude. Je baissais alors les yeux, lui demandant ensuite quel type d'homme... ou de femme elle venait chercher ici. Me rendant bien compte de la stupidité de ma question qui, au passage, était aussi particulièrement indiscrète, j'en devins une fois encore tout honteux et mon visage ne tarda pas à virer au rouge pivoine. « T’es bien curieux toi, tout d’un coup ! » J'eus l'impression, le temps d'un instant, que ma question la dérangeait plus qu'autre chose ce qui, bien sur, ne fit que me rendre plus mal à l'aise encore. « D’homme ! Quelqu’un d’aussi fou que moi. Ou quelqu’un qui me supporte. Si un mec réussi à canaliser mon énergie et ma langue, ça serait vraiment la cerise sur le gâteau ! Et qu'il aime les enfants aussi. Et puis il faut qu’il soit drôle, optimiste comme moi, dynamique, sportif, protecteur aussi ! Sinon physiquement je m’en fiche. Black, blanc, blond brun… Il peut même être roux ! » Wow, et bien... Si je me retrouvais dans certains traits de personnalité désignés par la rouquine, j'étais tout de même loin d'être le jeune homme dynamique, sportif et optimiste qu'elle disait rechercher. « Faut me dire ‘ta gueule’ quand je parle trop ! Parfois ça marche… Parfois ! » Je me mis à sourire, comme un idiot en fait. Comme si j'allais lui dire ce genre de choses, moi qui buvait littéralement chacune de ses paroles... « Et toi ? Femme ou homme ? Brune, blonde ouuuu rousse ? Dis-moi tout ! » Argh, à moi de répondre à présent. J'étais parvenu à garder le silence aussi longtemps que possible mais là, je ne pouvais pas me défiler. « À vrai dire... je ne sais pas trop ce que je recherche. Il me... me semble que je suis quand même plus porté sur les femmes mais mon passé pourrait témoigner du... contraire. » Tout cela pour dire que j'avais eu des expériences avec des hommes avant d'en avoir avec des femmes. La dernière en date, et seule femme que j'avais encore jamais aimé, m'avait brisé le cœur. Voilà pourquoi j'en venais à me remettre en question aujourd'hui. « Chez les femmes, mes préférences vont vers les brunes et les... rousses. Surtout les rousses. » Elle s'était entre temps rapprochée de moi, et j'eus soudainement très, très envie de disparaitre. Je disais aimer particulièrement les rousses et mademoiselle était rousse... ajoutez à cela le fait que j'étais intimidé et rouge à souhait et imaginez un peu ce que Saoirse pouvait s'imaginer, là tout de suite. Non vraiment, c'était à moi qu'il fallait dire "ta gueule" pour le coup.

Visiblement, il était bien du genre hyper gêné pour un rien, mais on pouvait dire que cela faisait partit de son charme. Ouai, on peut dire aussi que je le fais un peu exprès de le gêner, mais c’est tellement chou. Son mal à l’aise se sentait à deux kilomètres à la ronde, ce qui ne pouvait pas me faire réagir autrement que par un sourire. Depuis le début de notre conversation, je portais sans relâche ce sourire joyeux et parce que je l’étais vraiment. Je suis de nature spontanée et joyeux, et à moins de me faire une super mauvaise impression dès le début – dixit Malika – j’aimais tout le monde moi. Mais j’avais une petite préférence en ce qui concernait mes recherches. Plus que des préférences même ; j’avais carrément un listing des qualités qui me faisait complètement fondre et je le lui disais, puisqu’il avait la curiosité de vouloir le savoir. Curiosité, ça je ne l’avais pas dis, mais j’aimais bien les hommes curieux… « Mais bon tu sais, on tombe rarement sur ce que l’on cherche ! » (Ce n’était que des préférences. Moi ce qui m’importe principalement, c’est que l’homme en question supporte au moins les enfants. Je ne comptais pas m’étendre sur le sujet, sur ma fille, à moins que l’on me pose la question de savoir si j’avais une gosse ou non. En général, on me prend pour trop immature et donc incapable d’élever un enfant. Mais revenons à nos moutons ! ). Par contre, les filles bavardes n’entraient pas forcément dans le catalogue des préférences des hommes. Elles faisaient fuir, paraîtrait-il, ce qui posait un gros problème avec ma petite personne. Bah ouai, plus bavarde que moi tu meurs tout de suite mon frère. D’où ma petite intervention. Il pouvait aisément me dire de la fermer deux minutes, pour au moins pouvoir profiter de sa cigarette et moi, de la mienne. J’étais on ne peut plus sérieuse en plus, et ça le faisait sourire qui plus est ! Non, mais ce n’est pas censé être drôle Môsieur sourire béat. Allez ! À ton tour maintenant ! « À vrai dire... je ne sais pas trop ce que je recherche. Il me... me semble que je suis quand même plus porté sur les femmes mais mon passé pourrait témoigner du... contraire. » Je l’écoutais attentivement. Il me semblait comprendre qu’il avait eut des relations homo. J’avais précisé à la production que je n’avais jamais eu ce genre de relation, mais que celles-ci ne me dérangerais pas ; vu le nombre de filles présentes dans le chalet, ça pourrait vraiment arriver ! « Chez les femmes, mes préférences vont vers les brunes et les... rousses. Surtout les rousses. » Ooooooh ! Mon visage s’illumina de surprise et je lâchais un léger bruit. Oui bon, une sorte de rire, mais je ne me moquais certainement pas. Il ne fallait absolument pas qu’il croit ça, je ne m’attendais simplement pas à ce qu’il me révèle ça préférence envers les rousses et de plus, il le confirmait bien… « C’est vrai ? » Lui demandais-je en passant ma langue, sautillant sur le canapé comme un petit vert. Inutile de préciser qu’il était rouge comme une pivoine. Inutile aussi de dire que je voyais là une bien belle occasion de me fanfaronner en balançant mes cheveux détaché de droite à gauche. Mais ne serait-il pas en train de me dire que je lui plaisais ? Waouh, c’est qu’il était rapide le petit chou. « Je crois être la seule rousse ici en plus ! Je dois marquer une tonne de points alors, joli cœur ! » Bah quoi j’en profite un peu hein. Vous ne savez pas ce que c’est d’être rousse. Les moqueries presque permanentes quand on est gamin, quand on est ado. Je peux bien être heureuse d’entendre que quelqu’un au moins ici aimait les rousses. Il n’était peut être pas le seul, mais bon, c’est quand même le premier à me le dire. « Mais tu ne m’auras pas de cette manière, non mais ! Il ne suffit pas de me flatter ainsi pour faire chavirer mon coeur ! » Finissais-je par lui dire, avec une moue faussement hautaine.

Je me suis emporter et encore, j'ai coupé une partie de ce que j'avais écris pour ne pas faire trop long

« Mais bon tu sais, on tombe rarement sur ce que l’on cherche ! » J'étais bien d'accord là dessus. D'ailleurs cela faisait pas mal de temps maintenant que j'étais à la recherche d'une femme qui m'aimerait pour ce que je suis, soit un type franchement réservé, franchement maladroit et franchement ridicule, mais je n'avais toujours pas trouvé chaussure à mon pied. Pas que j'étais sur le point de jeter l'éponge pour de bon... quoi que si, en fait, je n'en étais pas loin. Parce que Saoirse m'avait demandé ce que je recherchais comme type de femme... ou d'homme, j'avais bien été obligé de lui signifier d'une façon très subtile que je m'étais déjà essayé aux deux. Je redoutais déjà une réaction assez négative de sa part, mais heureusement il n'en fut rien. Cela lui sembla être complétement égal et je dois avouer que sur le moment j'en fus soulagé. Vint ensuite le terrible moment durant lequel je lui avais avoué mon attirance pour les rousses et, par conséquent, elle. Et oui, sans mentir il me fallait bien reconnaitre que Saoirse ne me laissait clairement pas indifférent mais peut-être l'avait-elle remarqué depuis son arrivée... Je ne cessais d'être de plus en plus mal à l'aise, de plus en plus intimidé à mesure que notre conversation suivait son court. Bref, certains signes ne trompaient pas même si je tentais de les dissimuler... en vain. Pendant un moment je cru que la belle était en train de se moquer de moi, à cause du sourire qui avait prit place sur son doux minois et du petit rire qu'elle avait poussé alors. Mais je compris bien vite qu'en fin de compte, elle était plus surprise qu'autre chose. « C’est vrai ? » Je fis un signe de la tête comme pour lui répondre positivement. Là, elle se mit littéralement à sautiller dans tous les sens sur le canapé, puis lâcha ses longs cheveux roux avant de faire voltiger ceux-ci. « Je crois être la seule rousse ici en plus ! Je dois marquer une tonne de points alors, joli cœur ! » "Joli cœur"... Je ne pus m'empêcher de rougir de plus belle. Elle me gênait là, vraiment. Déjà que c'était difficile de la regarder dans les yeux après lui avoir clairement signifié qu'elle me plaisait beaucoup... Si en plus j'avais droit à ce genre de petits noms mignons, je n'étais pas prêt de m'en sortir. « Mais tu ne m’auras pas de cette manière, non mais ! Il ne suffit pas de me flatter ainsi pour faire chavirer mon coeur ! » Elle fit mine de se montrer un peu dédaigneuse, mais ça n'était pas sérieux bien sur et je le compris sur le champ. Par ailleurs je ne savais plus trop quoi dire. Je m'éclaircis alors la voix, avant de prendre la parole à mon tour. « ... Comme si tu... tu pouvais t'intéresser à moi Saoirse. » Je me mis à baisser la tête, car pour moi c'était perdu d'avance... avec elle comme avec n'importe quelle demoiselle ici d'ailleurs. Personne ne pouvait me trouver le moindre intérêt, il fallait me voir aussi. « Hum. Toi et moi on... on est de parfaits opposés. Alors surtout ne... ne te casse pas la tête à me donner de faux espoirs. J'ai... j'ai l'habitude. » L'habitude de m'entendre dire que je n'étais pas assez ouvert d'esprit, pas assez vivant, pas assez extraverti et j'en passe. Bref, je connaissais mes chances avec Saoirse : elles étaient tout simplement nulles. Mais j'étais prêt à m'en accommoder car voyez-vous, je ne m'attendais de toute manière pas à autre chose. J'étais lucide. Terriblement lucide. Stupide aussi, oui. Mais lucide avant tout.

aucun soucis j'adooore les pavés

C’était plutôt surprenant de l’entendre dire qu’il aimait les rousses, surtout en présence d’une rousse quoi. Je pense que, si j’avais été une timide, jamais je n’aurais avoué aussi facilement mes préférences comme ça, ni le confirmer comme il le faisant en bougeant la tête. Il en avait du courage. Je ne lui disais pas, mais je le pensais réellement et le courage était une super qualité, mais intoxiqué par un manque de confiance beaucoup trop prononcé. Je l’appelle joli cœur spontanément et voilà qu’il virait encore une fois au rouge. Je rigolais, évidemment. Je ne peux pas m’en empêcher, c’est plus fort que moi et c’est aussi ma manière de détendre l’atmosphère. Non, je pensais pouvoir détendre l’atmosphère comme ça, mais je me trompais royalement. Il était tout rouge en écoutant chacune des paroles que je prononçais. En fait, il se sentait embarrassé par ma présence. Pire encore, il se rabaissait plus bas que terre et il me jugeait très mal. « ... Comme si tu... tu pouvais t'intéresser à moi Saoirse. » C’était n’importe quoi. Alors oui, sur le coup et aux premières paroles que l’on avait pu échanger, il ne correspondait pas à ce que je cherchais, mais ne venais-je pas de dire que l’on ne tombait jamais avec ce que l’on veut. Merde alors ! Mon sourire s’estompa pour moue réellement vexée. « Qu’est-ce que t’en sais au juste ? Tu ne me connais même pas ! » J’étais rarement contrariée, sauf quand on se permettait de me dire de telles choses. Il avait la tête baissée, sa honte multipliée par mille et là, c’était bien justifié, mais moi j’ai pas honte de lui parler. Je le regardais, le fixant presque trop intensément. « Hum. Toi et moi on... on est de parfaits opposés. Alors surtout ne... ne te casse pas la tête à me donner de faux espoirs. J'ai... j'ai l'habitude. » Je secouais la tête de droite à gauche, consternée. « Pourquoi t’es venu ici alors ? » Clamais-je immédiatement et sans réfléchir. C’est vrai. Il venait dans une émission basé sur l’amour et il partait déjà avec l’idée en tête (c’est ce que je comprenais en tout cas) qu’il n’était pas assez bien pour repartir au bras de quelqu’un. Qu’est-ce que ça pouvait bien m’énerver les gens qui se rabaissent constamment ; rien de pire que le pessimisme poussé à son extrême. En plus, il disait des conneries plus grosses encore que lui. Je ne cherchais absolument pas à lui donner de faux espoirs et je ne le ferais jamais. Ni avec lui, ni avec un autre. C’est bien aussi pour ça que je lui avais détaillé ma liste de critère que j’aimais chez un garçon, mais ça ne voulait rien dire. Mon ex était pareil que moi et ça ne nous a pas réussis pour autant. Je me penchais pour ma écraser ma cigarette terminée contre le cendrier sur la petite table. « Tu l’as dis toi-même, on a déjà deux points communs. On ne se connait pas. Peut-être qu’on en a plus ! » Je reposais mon dos contre le dossier du canapé, croisant les bras sur mon ventre. En fait, la seule chose à faire pour arrêter de le gêner, de l’embarrasser, de le contrarier, c’était de m’en aller et de ne plus lui adresser la parole. Mais je ne peux pas moi ; de une parce que je ne suis pas comme ça, du genre à ignorer les gens ; de deux parce que je l’appréciais déjà et quoiqu’il en pense, je comptais le connaître mieux que quiconque ici.

« Qu’est-ce que t’en sais au juste ? Tu ne me connais même pas ! » Mince, je l'avais contrariée. C'était tout ce que j'avais voulu éviter mais de toute évidence, mes dernières paroles n'avaient pas franchement plu à la belle rousse. Pire, elle semblait maintenant m'en vouloir ce qui était insupportable. Bientôt elle se mit à secouer la tête, comme pour manifester son mécontentement. « Pourquoi t’es venu ici alors ? » Bien évidement, maintenant que la rousse m'enguirlandait quelque peu, je ne pouvais relever la tête et préférais encore garder celle-ci baissée. Toutefois, je marmonnai quelques mots après que celle-ci ait arrêté un instant de parler. « Non s'il te plait ne... ne t'énerve pas. » C'était très peu audible, mais ça sortait du cœur je vous l'assure. Puis elle est reprit de plus belle, sans vraiment décolérer. « Tu l’as dis toi-même, on a déjà deux points communs. On ne se connait pas. Peut-être qu’on en a plus ! » Désormais ses bras se voulaient croisés, et elle ne semblait toujours pas apte à passer outre mes paroles. Non, visiblement je n'aurais jamais du dire ça et avec le recul je commençais moi aussi à m'en rendre compte. J'aurais même cru, durant un instant, que Saoirse prendrait ses cliques et ses claques et quitterait cette pergola. Mais fort heureusement, elle n'en fit rien. Je ne vous dit même pas l'état dans lequel j'aurais été si elle l'avait fait. Je relevai finalement la tête, tout penaud toujours, et m'exprimai maintenant d'une voix plus perceptible. « C'est vrai je... je ne te connais pas. Pardon, j'ai pas voulu me montrer plus idiot encore que... que je le suis déjà. » Idiot, ah ça oui je l'était. Il n'y avait que moi pour partir aussi défaitiste avant même le grand départ. L'aventure ne faisait que débuter mais moi, je me voyais déjà repartir seul. J'étais comme ça, pessimiste jusqu'au menton. « Tu... tu m'en veux Sa... Saoirse ? » J'espérais que non, mais rien n'était moins sur. Ce qui l'était en revanche, c'était bel et bien le fait que je venais assurément de lui faire très très mauvaise impression, sans le vouloir qui plus est. J'eus la soudaine envie de me frapper la tête contre... contre quelque chose de relativement dur susceptible de m'assommer. Je restai cependant en place, tout simplement parce que je demeurais tétanisé et qu'il m'était impossible de bouger.

Ca m’arrivait très rarement, voire même quasiment jamais, d’être énervée, ou d’être même contrariée ou plutôt de le montrer. J’espérais que dans l’aventure, aussi loin que j’irais, que je n’aurais pas à l’être envers un seul des autres candidats. Je ne suis pas comme ça dans la vraie vie et mon seul souci ici et de paraître naturelle. Quand je ris, quand je fais la folle, je suis absolument naturelle (sans conservateur) ! À ce moment-là, c’était surtout contrariée que je fusse et je me laissais emportée, mais loin de moi était l’intention d’être méchante envers lui, ou de lui faire croire que j’étais énervée. « C'est vrai je... je ne te connais pas. Pardon, j'ai pas voulu me montrer plus idiot encore que... que je le suis déjà. » Mes bras étaient toujours croisés et mon regard attaché à sa personne. Je le vis relever sa tête avant de parler, et la confusion qui envahissait son visage. Je lâchais un soupire, cédant face à cet être ayant beaucoup trop peu d’estime pour lui-même. « Arrêtes ! Tu ne m’as pas l’air idiot du tout. » Lui avouais-je, fronçant légèrement les sourcils et lui adressant un timide sourire en coin pour appuyer mes dire. Je ne voyais pas en quoi il était idiot. Je voyais juste un mec avec un gros handicap et qui s’enfonce toujours un peu plus. J’ai ce pressentiment que, s’il ne faisait pas d’efforts, le public finirait par se lasser de lui. Ce qui serait vraiment trop nul quoi. « Tu... tu m'en veux Sa... Saoirse ? » Cette fois-ci, c’est moi qui baissais ma tête, mais que pour quelques secondes et avec un sourire en coin. Je relevais alors mes yeux vers lui et secouait vivement ma tête de droite à gauche pour lui signifier que non. Evidemment que non, je ne lui en voulais pas, pas pour le moins du monde. Je relevais alors totalement ma tête, mordillant ma lèvre inférieure et mes yeux le fusillant un peu du regard. « Je t’en voudrais si tu continue de croire que je suis ce genre de fille… Une fille trop bien pour toi… Et si tu continue à te rabaisser comme ça. » Je lui ai dis : je n’aime pas les pessimistes, et je n’aime pas non plus les introvertie, ou les timides beaucoup trop timide. « Et je t’en voudrais aussi si tu ne me payes pas une cigarette la semaine prochaine ! » Je finissais par lui adresser un sourire. Il ne pouvait pas me refuser ça. Celle-ci, celle que je venais de fumer, je n’en avais même pas profité finalement. Et s’il oublie ce deal, je saurais m’en rappeler !

« Arrêtes ! Tu ne m’as pas l’air idiot du tout. » Mouais, ça restait encore à prouver mais j'appréciais déjà le fait qu'elle me dise que je n'en avais pas l'air. Tellement de personnes s'étaient permises de me dire exactement le contraire, sans me connaitre bien évidement. Mon opinion là dessus ? Et bien, il m'était difficile de me juger, mais j'avais souvent tendance à me considérer comme un idiot. Je manquais surtout de confiance en moi, oh oui atrocement. Alors forcément, je n'avais plus de grande estime de moi-même. Ma plus grosse crainte maintenant était que Saoirse puisse m'en vouloir. Et oui il y avait bel et bien un risque, car j'étais tout de même parvenu à la mettre en colère elle que je connaissais si enjouée. Fort heureusement, elle me signifia d'un signe de la tête que ce n'était pas le cas. « Je t’en voudrais si tu continue de croire que je suis ce genre de fille… Une fille trop bien pour toi… Et si tu continue à te rabaisser comme ça. » C'était malheureusement plus fort que moi, je n'étais pas assez sur de moi pour me valoriser ou pour ne serait-ce que me considérer comme un garçon comme les autres. « Et je t’en voudrais aussi si tu ne me payes pas une cigarette la semaine prochaine ! » Elle semblait d'un coup plus détendue. J'eus même droit à un sourire, ce à quoi j'avais bien cru devoir renoncer pour de bon quelques instants plus tôt. Ma foi j'allais bien sur lui payer une cigarette la semaine prochaine. Si c'était le prix à payer pour qu'elle ne m'en veuille pas... « Je... je te jure que j'aimerais gagner en confiance. Mais c'est pas aussi... simple. » Quand je voyais les autres candidats déborder d'énergie et se mettre très en avant, j'en venais à regretter la personne que j'étais devenu. Seulement nous étions tous différents, et changer de caractère et de personnalité me demanderait énormément d'efforts... et de temps. « Je te promets que tu... tu l'auras ta cigarette... belle rousse. » Oui belle rousse, parfaitement. Et pourquoi pas après tout ? Elle était belle, elle était rousse. Alors à quoi bon m'astreindre à ne l'appeler que par son prénom, très joli par ailleurs ? Je me retrouvais d'un coup soulagé, un peu moins honteux. Pourvu que cela dure.

Je ne pouvais franchement pas lui en vouloir ; pas pour ça en tout cas. Je comprenais bien qu’il puisse être trop timide pour s’avouer qu’il n’était pas qu’une sous merde. Qu’il avait dû être malmené par des gens pour avoir une si mauvaise image de lui-même. Ca me faisait de la peine, à mon petit cœur, de voir qu’il se croyait moins bien que les autres ici. Ca se voyait gros comme une maison qu’il ne se sentait pas à la hauteur, d’où ma question d’ailleurs. Qu’est-ce qu’il était venu faire là, en partant carrément défaitiste. De mon côté, j’étais là pour trouver l’amûûûr et au pire, une super aventure humaine, et je sais que je suis capable de la trouver parce que je ne me soucis pas de ce poids qu’est la timidité. J’ai bien l’impression que pour Dimitri, c’est complètement l’inverse et que s’il restait ainsi, jamais il ne prendrait de plaisir à participer à ce jeu. « Je... je te jure que j'aimerais gagner en confiance. Mais c'est pas aussi... simple. » Mes lèvres se tordirent un peu, effaçant un peu mon sourire. Je voulais bien croire que ce n’était pas aussi simple, mais il devait se battre. Enfin ! Genre, il y a des trucs contre la timidité quand même ! « Jurer ça sert à rien » Commençais-je, avec une petite grimace. « Je ne peux pas te donner de conseil, je ne sais même pas ce que c’est que d’être timide. Enfin ce qu’on ressent… c’est vrai d’ailleurs, qu’est-ce que tu ressens ? » C’était un peu maladif, mais ma curiosité me poussait à poser de telle question. Oh il n’était pas obligé de me répondre, en même temps c’est un peu bizarre et je ne suis pas une psy. Et alors que je pensais à ça, mes yeux s’arrondirent et une lueur passait dans ceux-ci, signe d’une idée. « Il faut que tu fasses de l’auto persuasion ! » Lui disais-je, en tapotant ma tempe avec mon index, le regardant d’une façon… persuasive ? « Tu sais, la méthode Coué ! Tous les matins tu te dis : J’suis trop un boss ! Tu verras, ça va marcher ! » Je lui parlais, version boss justement, pour lui faire essayer cette méthode. Il paraitrait que ça fonctionne vraiment bien. J’essayais aussi, accessoirement, de le faire sourire. « Je te promets que tu... tu l'auras ta cigarette... belle rousse. » Je lâchais un léger rire, de nouveau d’étonnement. « Tu vas me faire rougir ! » rigolais-je, en tapotant mes joues, mais c’est qu’il va pourrait réussir à le faire. Finalement je me levais du canapé, tapotant un peu mon cul pour remettre bien la jupe que je portais. « T’as pas intérêt d’oublier… j’ai une bonne mémoire… et puis continue de m’appeler comme ça ! Belle rousse… ça le fait grave ! » Finissais-je par lui dire ; lui offrant un clin d’œil en signe d’au revoir. Je lui tournais le dos et m’en allait en direction du parc.

Gagner en confiance... Mais je ne désirais que ça, moi. Devenir plus confiant, être un peu plus sur de moi. Seulement cela risquerait d'être bien compliqué ou me demanderait assurément pas mal de temps avant d'y parvenir. Bref, je n'étais pas encore trop disposé à avoir confiance en moi. « Je ne peux pas te donner de conseil, je ne sais même pas ce que c’est que d’être timide. Enfin ce qu’on ressent… c’est vrai d’ailleurs, qu’est-ce que tu ressens ? » Il m'était bien difficile de mettre des mots sur mes sentiments, mais je prenais cela comme une question, une question à laquelle il me semblait logique de répondre. « Ce... ce que je ressens... L'envie de me... me faire oublier, de me faire tout... petit. D'être invi... invisible, même. » La timidité, quand celle-ci était poussée à l'extrême et c'était mon cas, pouvait s'avérer être très handicapante dans la vie de tous les jours. « Il faut que tu fasses de l’auto persuasion ! » Je ne voyais pas trop où elle voulait en venir, mais très vite elle se montra plus claire dans ses propos. « Tu sais, la méthode Coué ! Tous les matins tu te dis : J’suis trop un boss ! Tu verras, ça va marcher ! » Je me mis à sourire. Honnêtement, je me voyais mal me lever le matin et dire ce genre de choses. Ça n'était pas moi, ça ne me ressemblait pas et je doutais même qu'un jour je puisse en venir à me dire ça. Par ailleurs je n'avais pas hésité à apostropher Saoirse de "belle rousse", ce qui la fit rire. Tout en se tapotant les joues, celle-ci répondit « Tu vas me faire rougir ! » Oh, ça n'aurait pas été si mal. Au moins nous nous serions retrouvés dans la même situation, car il ne fallait pas oublier que je ne cessais de rougir depuis tout à l'heure. Saoirse se leva finalement du canapé sur lequel elle se trouvait assise, avant de remettre sa jupe bien droite. « T’as pas intérêt d’oublier… j’ai une bonne mémoire… et puis continue de m’appeler comme ça ! Belle rousse… ça le fait grave ! » Je ne risquais pas d'oublier que je lui devais une cigarette. J'eus droit à un clin d'œil de la demoiselle, qui s'en alla direction le parc. Quant à moi, je restai assis là quelques minutes, avant de me lever à mon tour pour regagner le chalet et plus particulièrement la cuisine où j'allais mettre en pratique mes talents de pâtissier. Histoire de me changer les idées et de recouvrer mes esprits.

Sujet terminé pour Dimitri.