Un miracle. Un miracle malheureux – très malheureux, en fait – mais un miracle quand même. Huit heures pétantes et j'étais réveillé. Un miracle, c'est bien ce que je disais. Pas levé pour longtemps, cela dit. Mon horaire habituelle de lever, c'était plutôt dix heures. Bon, okay, onze heures, voire onze heures trente. Alors forcément, si j'étais réveillé aussi tôt, ce n'était pas avec bonne humeur, mais plutôt avec une migraine. Alors malgré l'heure trop matinale et indécente, je me sortis du lit, cependant qu'à côté de moi dans le lit, Malika dormait paisiblement, en toute logique. Assez péniblement, je m'extirpai des draps, quittai la chambre et j'allai jusqu'à la salle de bain. Là, je me passai un peu d'eau sur le visage, bien que cela n'eut pas grand effet sur moi, et je pris une aspirine. Pour la migraine et parce que ça m'aiderait peut-être à me rendormir. Pas de douche, pas de petit-déjeuner, je filai retrouver mes pénates. Je ne faisais pas attention, puisque je me trompai de chambre – mais ça, je m'en rendrais compte un peu plus tard. Je me glissai dans le lit, me retournai. J'avais beau ne pas être bien réveillé, je ne reconnaissais clairement pas Malika à côté de moi. Plutôt Lust. Et qui me regardait avec suspicion. Je fronçai les sourcils. « Non je ne me suis pas trompé de chambre. » clamai-je tout haut, pas crédible pour un sou. Je ne bougeai pas pour autant. Qu'elle essaye de me virer du lit, tiens.

La bonne nouvelle, après le prime de vendredi dernier, c’est que Jewon s’est fait éliminer. Donc, un candidat en moins dans la chambre d’Arès. Et puisqu’il partageait son pieu avec Lust, vous voyez, elle peut enfin roupiller seule. Et autant dire qu’elle en profitait vachement. Faut dire qu’elle avait perdu l’habitude d’être seule dans un lit, Lust, avant ce jeu. Soit, en tout cas, elle était seule dans son lit, avant qu’un intrus débarque là, tout de suite. Et Lust, qui a un sommeil plutôt léger, se réveille forcément. « Bordel, Benjamin, je sais pas c’que t’as en tête mais va te faire foutre et barre toi tout de suite de mon lit si tu veux garder ta paire de couilles intacte. » Ce type-là, il est bizarre quand même. Enfin, Lust suppose qu’il s’agit de lui. Il ne reste plus que Léa et lui, dans la chambre, et elle n’imagine pas franchement Léa s’incruster dans son lit. Remarquez, Benjamin non plus. Mais puisqu’elle a assez du mal à le cerner, vous voyez. Soit. Toujours aussi adorable, Lust, même à huit heures du matin, ouais. Faut la comprendre. Il est huit heures, bordel. Lust se retourne, et tombe nez à nez avec Emmett. Il clame qu’il ne s’est pas trompé de chambre. Ouais, bien sûr. « Autant partager ma douche avec toi, ça m’a plu, mais si tu comptes rester là, on ne va pas être potes bien longtemps. »

« Bordel, Benjamin, je sais pas c’que t’as en tête mais va te faire foutre et barre toi tout de suite de mon lit si tu veux garder ta paire de couilles intacte. » Retrouvant ce que je croyais être mon lit, je n'eus pas droit à un accueil très chaleureux – plutôt violent, en fait. Voilà que mes bijoux de famille étaient menacés. De quoi vous faire prendre vos jambes à votre cou, à moins d'être aussi fatigué que je l'étais. Je répliquais que je ne m'étais pas trompé de chambre ce qui, vraisemblablement, était complètement faux. « Autant partager ma douche avec toi, ça m’a plu, mais si tu comptes rester là, on ne va pas être potes bien longtemps. » Assez étrangement, plus elle me menaçait, pestait et s'énervait, plus j'avais envie de rester dans ce lit, pour l'embêter encore plus. Jusque là, je ne m'étais pas fait d'ennemi dans le jeu. Pas un seul différent, en fait, ce qui relevait presque de l'exploit. Peut-être que ça allait changer aujourd'hui et que j'allais avoir ma première altercation avec Lust. En tout cas, c'était un peu ce que je cherchais : « Dans ce cas, on ne va pas s'entendre. » lui répondis-je en rabattant la couette sur moi, lui montrant ainsi que je n'avait aucunement l'intention de quitter son lit – puisqu'en effet je m'étais trompé, c'était bien son lit et non le mien. Je la regardai et baillai longuement. « Mais, si tu veux, on pourra quand même prendre une douche ensemble après. » Provocateur ? À peine.

Emmett doit être suicidaire sur les bords. Ou il a des tendances masos. Parce que, oui, même si sa menace était adressée à Benjamin, finalement, elle compte tout aussi bien pour Emmett. Dans le genre d’emmerdeur, ce type bat tous les records. A huit heures du matin, bordel, laissez la pauvre Lust roupiller en paix, un peu de gentillesse dans ce monde de brutes ! Il lui répond qu’ils n’allaient donc pas s’entendre. Doux jésus. Il signe son arrêt de mort ou quelque chose de ce goût-là. Non, vraiment. Lust se demande ce qu’il lui passe par la tête, là, tout de suite. Ou si c’est une vaste blague. Genre, est-ce qu’elle file dans son lit en douce, elle ? Absolument pas. Il baille. La fixe du regard. Dans le genre provocateur, aussi, on ne fera sans doute guère mieux. Il parle de prendre une douche après. Cause toujours. Putain d’emmerdeur. Si tôt. Y’a de quoi se pendre. Lust lève les yeux au ciel. Tentée de lui foutre un nombre incalculable de coups de pieds pour le faire déguerpir, ou au moins le faire tomber du lit. L’ennui, c’est qu’avec sa force de moineau, elle aurait plutôt l’air ridicule et n’arriverait pas à grand-chose. « Je te préviens, j’ai la fâcheuse habitude de dormir toute nue, tu vois. » Sourire hypocrite. Parce qu’elle serait plutôt d’humeur à faire un geste plutôt grossier qu’à lui sourire, vous voyez. Hm, et non, elle n’est pas nue, là, tout de suite. Enfin. « Je dis ça, parce qu’apparemment, le corps des nanas fout la trouille aux homos, tu vois. Je ne voudrais pas que tu prennes peur en restant dans ce lit. » Ouais étant donné qu’elle n’a pas tellement entendu qu’Emmett avait déjà fricoté avec quelques demoiselles dans le jeu, elle en conclut qu’il doit être homo, le type. D’autant plus qu’entre toutes les histoires de gars qui se déroulent ici, entre Sacha/Dylan, Sacha/Noah, Noah/machin, Noah/truc, Lust commence à se dire que le casting est entièrement gay, vous voyez. Enfin, au pire, elle s’en fout.

L'aspirine commençait à faire son effet et j'étais dans un bon lit douillet : j'aurais dû être bien, content, heureux, à même de retrouver les bras de Morphée. Mais voilà, Lust ne semblait pas d'accord, parce que j'étais dans son lit et parce qu'elle n'était pas partageuse. Mais peu m'importait. Maintenant que j'avais retrouver un lit, je ne comptais pas le quitter. Et si ça contrariait Lust – ce qui était clairement le cas –, je n'en avais rien à faire. Tant pis pour elle. « Je te préviens, j’ai la fâcheuse habitude de dormir toute nue, tu vois. » répliqua-t-elle avec un sourire hypocrite. Si elle pensait que ça allait me faire fuir, elle se mettait le doigt dans l’œil. « Je dis ça, parce qu’apparemment, le corps des nanas fout la trouille aux homos, tu vois. Je ne voudrais pas que tu prennes peur en restant dans ce lit. » ajouta Lust. Ce qui expliquait sa réponse précédente. Je souris du plus belle. Parce qu'il allait en falloir beaucoup plus pour me faire quitter ce confortable lit. Non seulement je n'étais pas gay, mais en plus je n'avais aucun problème avec la nudité ou le corps des femmes – bien au contraire. « Désolé de te décevoir, mais le fait que tu sois nue n'est absolument pas un problème pour moi. » Je m'enfonçai dans le lit, ne me gênant pas pour prendre autant de place que nécessaire. « Je peux dormir maintenant ? » requérais-je avec un petit sourire et en roulant les yeux. Lust avait beau ne pas être contente de me voir dans son lit, elle pouvait bien me laisser dormir tranquillement. Ou pas.

Croyez-le, c’est bien la première fois qu’elle se retrouve dans une situation semblable à celle-ci. Comment ça se fait que Lust, elle ne s’était pas aperçue du potentiel emmerdeur qu’allait devenir Emmett, lorsqu’elle a pris sa douche avec lui ? Un type pareil, en théorie, ça se remarque des kilomètres à la ronde. Est-ce qu’il pensait que Lust allait l’accueillir les bras ouverts ? Espérons que non. Y’a pas écrit « Sainte-Lust » sur son front non plus. La gentillesse, ce n’est pas son truc. Et si à quelques rares moments de la journée, il lui arrive de faire des efforts exceptionnels, autant dire que ça n’arrivera jamais, ô grand jamais, à huit heures du matin. Et monsieur à, en clair, le culot de lui demander de la fermer histoire qu’il puisse pioncer. Vraiment, mon gars ? Mon dieu. L’enfoiré, en fait. « putain d’enfoiré. » L’ennui, c’est qu’à choisir, Lust aimerait bien se rendormir aussi, plutôt que batailler pour que cet énergumène daigne sortir de son lit. « Emmett ? Du con ? Branleur ? » Monsieur tourne enfin la tête vers elle. Pas trop tôt. Vous voyez, le genre sangsue ? Lust adopte cette méthode. Elle se serre, se colle contre le corps du candidat. Et puis, elle l’empoigne par la nuque, tirant sur deux-trois malheureux cheveux au passage. Elle plaque ses lèvres sur les siennes, genre, grosse sauvageonne, tout en veillant à le maintenir contre elle comme elle peut. Ce serait con qu’il la repousse, vous comprenez ? Et là, suffit de vous visualiser le pire baiser de votre vie, et vous y êtes. Un mélange de baiser machine à laver/baiser baveux, vous voyez. Bien dégueulasse. Bien volontaire aussi. Avec ça, s’il ne fuit pas, Lust, elle ne comprend plus rien.

Je me doutais bien que Lust n'allait pas en rester là. Elle m'avait clairement fait comprendre qu'elle ne voulait pas de moi dans son lit et j'aurais presque été déçu si elle n'avait pas tout mis en œuvre pour me faire dégager. Cependant, je me recouchai sur le côté et fermai les yeux, tout prêt à retrouver le sommeil dans ce lit-là. J'avais encore le courage de donner du fil à retordre à Lust et à l'emmerder au possible, mais je n'en avais pas assez pour me traîner jusque mon lit à moi, même si elle aurait bien aimé. D'ailleurs, elle avait toujours en tête de me faire dégager de son lit et à ce moment elle devait me détester d'être encore là. « putain d’enfoiré. » marmonna-t-elle et je souris, même si elle ne pouvait le voir. « Emmett ? Du con ? Branleur ? » Devant tant d'insistance et de jolis noms d'oiseaux, je finis par ouvrir les yeux et me tourner vers elle. Et là, surprise. Là voilà qui se collait à moi, m'attrapait par la nuque sans aucune douceur et plaquait ses lèvres contre les miennes. S'ensuivit le baiser le plus mouillé, le plus secouant, le plus répugnant et le plus interminable de toute ma vie. Parce qu'elle était maligne, Lust, elle avait fait en sorte que je ne puisse pas lui échapper. Et que ça bavait, et que ça tournait, et que ça ne se finissait pas. Presque à en vomir. Enfin, elle décolla ses lèvres des miennes et je pus respirer. Pouah, avais-je envie de m'exclamer. Mais je ne le fis pas. Parce que ça aurait été une victoire pour elle, ce que je ne souhaitais évidemment pas. Elle voulait jouer à ça ? Très bien. « Merci l'escargot. » répondis-je donc, après quelques secondes pour reprendre mon souffle. Le merci, c'était plus pour la forme et pour lui faire comprendre que sa tentative de me virer de son lit avec un baiser dégueulasse était un échec. Parce que le baiser baveux, je m'en serais bien passé, en fait. Escargot, c'était pour la bave bien entendu. « On peut aussi jouer à touche-pipi, si tu veux. » lui lançai-je, provocateur, pendant que ma main s'aventurait près de la zone rouge pour confirmer mes propos. J'entrai dans son jeu, clairement. Et je n'avais pas l'intention de perdre. Encore moins de quitter son lit.