Dix heures cinquante. L'heure pour certains de poursuivre leurs activités de la matinée. De sortir. De s'occuper. L'heure pour moi de juste sortir du lit. Un vrai lève-tard, incorrigible. Je me levai donc, assez péniblement malgré l'heure tardive – incorrigible, vous disais-je. Mes colocataires de chambres étaient dors et déjà sortis du lit, comme souvent. Je m'étirai, enfilai rapidement quelques fringues puis, sentant mon ventre qui déjà se mettait à grogner son mécontentement, je sortis de la chambre pour prendre la direction de la salle à manger. Peu importe l'heure à laquelle je me réveillais, il me fallait un petit-déjeuner digne de ce nom. Café, jus d'orange, petits pains et autres viennoiseries. Pour ça, les mets dont nous disposions étaient parfaits et comblaient on ne peut mieux mon appétit. J'entrai dans la salle à manger donc, salivant d'avance de mon futur délicieux petit-déjeuner. Je ne fus pas surpris de constater que la salle était vide. La plupart des candidats se levaient tard, mais pas autant que moi et j'avais l'habitude désormais d'arriver pour petit-déjeuner quand tous venaient d'en sortir. J'eus tout juste le temps de me servir une tasse de café et de couper un petit pain que la porte s'ouvrit sur un candidat. N'arrivant pas à l'identifier ni à mettre un prénom sur son visage, j'en déduisis qu'il s'agissait de l'un des nouveaux arrivés lors du second prime. « Bonjour, et bienvenue. » lançai-je, non sans enthousiasme. Une fois n'est pas coutume, j'étais plutôt d'humeur joyeuse, et généreuse aussi, puisque je proposai : « Café ? »

Bon sang que le réveil était difficile. Je n'avais définitivement pas l'habitude de me lever aussi tôt. Me lever avant midi ça me paraissait être quelque chose d'infaisable et pourtant j'étais bien là, réveillé à même pas onze heures. Je ne savais pas combien de temps il allait me falloir pour m'habituer à ce nouveau rythme mais j'avais pour le moment beaucoup de mal à m'y faire. Ne quittant généralement pas le travail avant quatre heures du matin, il était évident que je n'avais pas le même rythme que les autres. Pourtant j'essayais de m'adapter tant bien que mal et de ne pas passer pour un ermite qui dort jusqu'à quatorze heures. Cela me demandait un effort presque surhumain mais au final je survivrai. Mais je ne survivrai définitivement pas sans une bonne dose de caféine. Difficilement je mis alors un pied devant l'autre, encore fatigué de ma nuit trop courte. Arrivé dans la salle à manger je constatais que je n'étais pas seul. « Bonjour et merci. » lui répondis-je poliment avant de m'affaler sur la chaise la plus proche de moi. Je n'arrivais plus à tenir debout et visiblement j'avais beaucoup de mal à parler, incapable d'aligner des mots de plus de deux syllabes. « Avec plaisir. » Du café était le bienvenu pour réveiller mon organisme encore endormi, même s'il allait m'en falloir une bonne dose pour parvenir à me réveiller totalement. Ou alors une cigarette, allez savoir. « Tu es ? » demandais-je d'une voix encore endormie. De deux syllabes, j'étais maintenant passé aux mots d'une seule syllabe, j'allais vraiment de mieux en mieux.

J'accueillis le nouveau – dont je ne me rappelais pas le prénom – avec un sourire et lui servis volontiers une tasse de café. Il semblait d'ailleurs en avoir encore plus besoin que moi, d'après le visage qu'il arborait et la façon dont il s'était affalé sur l'une des chaise entourant la table. Cela semblait normal, étant donné qu'il venait juste d'arrivé. Moi-même, j'avais trouvé mes premiers jours de l'aventure éprouvants. Géniaux, plus qu'on ne peut l'imaginer, mais aussi très fatigants. Le café du petit-déjeuner était clairement le bienvenue. « Emmett, et toi ? » répondis-je lorsqu'il me demanda mon prénom. Étant donné qu'il faisait parti des nouveaux candidats arrivés lors du second prime, nous n'avions pas encore eu l'occasion de faire connaissance. « Hm. Bien dormi ? » demandai-je ensuite, pour entamer la conversation. Même si ma question n'était pas des plus malignes. En effet, au vu de la fatigue qui se lisait sur son visage, la réponse serait sans doute non.

Jamais je n'avais eu autant besoin d'une tasse de café qu'à cet instant. Je n'aurais su dire combien d'heures j'avais dormir quatre peut être un peu plus, peut-être un peu moins mais ce n'était absolument pas suffisant pour que je parvienne à avoir une attitude normale et à faire des phrases correctes cela va s'en dire. Par la suite il me donna son prénom que je tâcherai de ne pas oublier, même si me connaissant cela allait être une tâche difficile. Je suis capable de retenir beaucoup de choses, mais des noms vous savez c'est beaucoup plus difficile. « Jewon. » J'étais encore capable de me souvenir de mon prénom, c'était déjà un point pour moi. J'entendis alors sa voix s'élever une nouvelle fois pour me demander si j'avais bien dormi. J'eus quelques secondes d'hésitation, vu ma tête il devait certainement se foutre de ma gueule. Mais visiblement cela n'avait pas l'air d'être son intention et il semblait tout à fait sérieux. « Absolument pas, je ne comprends pas comment les autres font pour se lever si tôt. » Parce qu'en plus du sommeil qui me fuyait les autres se levaient à des heures incroyablement matinales et il fallait avouer qu'ils étaient clairement très bruyants lorsqu'ils se levaient.

À peine avais-je commencé à assimiler les prénoms des candidats présents au chalet que cinq autres avaient débarqués. Cinq nouveaux prénoms donc. Même si ça devait être encore plus difficiles pour les fameux nouveaux qui, en plus d'arriver une semaine après tout le monde, devaient apprendre tous les prénoms d'un coup. Bref. Ce candidat s'appelait donc Jewon. Espérons que je m'en souviendrai. Comme je l'avais deviné, les apparences n'étaient pas trompeuses et Jewon n'avait pas passé une très bonne nuit. Très courte, sans aucun doute. Les lits dans lesquels nous dormions étaient d'un confort impérial, cependant nous aimerions tous dormir quelques heures de plus, tels les paresseux que nous étions. « Absolument pas, je ne comprends pas comment les autres font pour se lever si tôt. » Je ne pus qu'approuver d'un signe de tête. La plupart des candidats, s'ils ne se levaient pas aux aurores, étaient tout de même debout à une heure assez matinale, ce qui n'était pas mon cas. « Tout à fait d'accord. Personnellement, j'aurais presque pu dormir quelques heures de plus... » On ne dort jamais assez. Ou presque. Parce qu'à cet instant, je n'avais plus sommeil. Mais j'avais faim. Je pris donc le petit pain que j'avais coupé et y étalai une fine couche de confiture avant de croquer dedans. « Enfin, j'imagine que tu es quand même content d'être là. Je me trompe ? » demandai-je avant de manger le reste de ma tartine et de boire une longue gorgée de café bien chaud.

Je ne pouvais qu'être d'accord avec ce qu'il venait de dire, quelques heures de sommeil en plus aurait été grandement profitables. J'espérais me rattraper la nuit suivante, si les autres me laissaient n'avaient pas la bonne idée de se lever à des heures indécentes, c'est à dire au moins avant onze heures. « Évidemment, ce ne sont pas quelques heures de sommeil en moins qui vont m'empêcher de profiter de l'aventure. » lui répondis-je, alors que mes lèvres s'étiraient lentement pour laisser place à un léger sourire, seule chose que j'étais en mesure de faire pour le moment. Après tout ce n'était pas parce que j'avais cruellement besoin de dormir, que ça allait m'empêcher de m'amuser et de vivre l'aventure comme j'en avais envie. « Cette première semaine, des faits marquants ? » m'enquis-je toujours incapable de former une phrase complète. Je ne voulais pas connaître tous les potins du chalet, parce que cela ne m'intéressait mais simplement je tenais à savoir s'il y avaient des choses absolument importantes qui s'étaient déroulées lors de la première semaine et que je devais à tout prix connaître.

« Évidemment, ce ne sont pas quelques heures de sommeil en moins qui vont m'empêcher de profiter de l'aventure. » me dit Jewon et je ne pus qu'approuver d'un signe de tête. « Tout à fait. » Moi aussi, malgré mes nuits plus que pleines et mes petits moments volés de solitude, je passais le reste de mon temps à profiter pleinement de l'aventure. Il aurait été idiot de ne pas en faire ainsi. On oubliait vite la fatigue ou le manque de sommeil ou quoi que ce soit d'autre pour profiter simplement de l'instant présent et vivre l'aventure comme il se devait. « Cette première semaine, des faits marquants ? » Je réfléchis. Pour ma part, non, rien de significatif. Autrement, nous avions tous plus ou moins commencé à faire connaissance et, d'après ce que j'avais pu comprendre, certains jeux de séduction s'étaient mis en place, mais rien de très marquant. Je répondis donc : « Non, pas que je sache. Mais je ne suis peut-être pas au courant de tout. » répondis-je en haussant les épaules et esquissant un sourire. Je bus quelques gorgées de jus d'orange, prit un autre petit pain que je découpais puis tartinais comme je l'avais fait avec le premier. « Ça ne devrait pas être trop compliqué de rattraper la semaine que tu as manqué. » lui assurai-je, me voulant rassurant d'une certaine façon.

Sans être d'un naturel nécessairement curieux, j'avais tenu à m'informer sur ce qui avait pu se passer de marquant lors de cette première semaine d'aventure à laquelle je n'avais pas participé. Après tout il y avaient peut-être des choses qu'il m'était indispensable de savoir concernant la semaine passée. Mais visiblement il sembla m'affirmer qu'il n'y avait eu aucun fait marquant, ou du moins pas qu'il n'ait été au courant. « Tant mieux alors. » répondis-je alors qu'un léger sourire naquit sur mes lèvres. Après tout si rien d'important ne s'était passé, cela ne me donnait pas un retard considérable sur les autres et j'avais peut-être plus de chance de m'intégrer. Il était certain que ce serait sans doute plus difficile car nous étions arrivés une semaine après tout le monde mais je ne m'en faisais pas trop à ce sujet. A cela il ajouta que cela ne devrait pas être trop difficile pour nous, et pour moi en l'occurrence de rattraper ce que j'avais manqué durant la semaine dernière. Je l'espérais en tout cas. « J'espère bien. J'espère que l'on ne nous considérera pas comme les nouveaux pendant tout le restant de l'aventure. » Après tout il y allait bien y avoir un moment où tout le monde oublierait que nous étions rentrés après tout le monde n'est-ce pas ?

Manifestement, Jewon semblait soulagé d'apprendre qu'aucun fait marquant n'avait eu lieu lors de la première semaine, à laquelle il n'avait pas participé. À mon humble avis, leur retard, à lui et aux autres candidats arrivés lors du dernier prime, serait vite rattraper. D'ailleurs, la production leur avait judicieusement permis d'être immunisés pour les nominations de la semaine, les protégeant d'une éventuelle élimination et leur permettant ainsi de passer au moins deux semaines au chalet, largement assez de temps pour rattraper la semaine qu'ils avaient manqué. « J'espère que l'on ne nous considérera pas comme les nouveaux pendant tout le restant de l'aventure. » Je comprenais sa crainte, cela devait être dans une certaine mesure difficile d'arriver après tout le monde mais, une fois de plus, je le rassurai : « T'en fais pas pour ça. » On allait vite oublier qui était arrivé quand et je ne pensais pas que quiconque parmi les nouveaux candidats aurait du mal à s'intégrer immédiatement, bien au contraire. « Et sinon, tu viens d'où ? » demandai-je à Jewon, curieux aussi d'en apprendre un peu plus à son sujet et de faire connaissance comme avec les autres candidats de la première semaine.

Oui j'espérais vraiment que le fait d'être arrivé une semaine après les autres ne me seraient pas préjudiciable pour le reste de l'aventure. Pour le moment je m'intégrais plutôt bien, personne ne m'avait fait ressentir le fait que l'aventure avait commencé une semaine avant que je ne l'intègre et personne n'avait cherché à me mettre à l'écart. Alors oui certainement je ne devais pas m'en faire. Il avait raison, tout se passait bien jusqu'à présent, je ne voyais aucune raison pour que cela change. Enfin ce n'était pas la peine d'épiloguer sur le sujet de toute manière, il valait mieux laisser l'avenir s'en charger. Il me demande alors d'où je venais, ce qui était sans doute la chose la plus intéressante à savoir sur moi. Non sans blaguer, vraiment. Pas que j'apprécie particulièrement la ville où j'habite mais disons que le reste est totalement inintéressant me concernant. « Baltimore. C'est pas New-York mais disons qu'on s'y fait. » Ouais j'avais toujours rêvé de vivre à New-York, mais disons que c'est une ville bien trop grand et trop onéreuse pour un mec comme moi. « Et toi tu viens d'où ? A première vue j'aurais dit Los Angeles, ou une ville ensoleillée en tout cas. » Allez savoir pourquoi trouver les réponses aux questions que je posais moi-même avait toujours été un de mes passe-temps favoris. Pas que je sois fou, simplement j'aime bien faire ça. Ouais je sais c'est étrange parfois, pourtant à part cela je suis parfaitement normal.

« Baltimore. C'est pas New-York mais disons qu'on s'y fait. » Je ne connaissais absolument pas Baltimore, je me demandais même si j'y avais déjà mis les pieds, mais je ne doutais pas que c'était une ville où il faisait bon vivre. Ce n'était pas New-York, cette ville si grande, en constante effervescence, où beaucoup rêvaient de vivre et où j'avais vécu quelques années en arrivant aux États-Unis, réalisant un rêve de gosse. Mais j'imaginais qu'elle devait avoir son charme et ses atouts. « Et toi tu viens d'où ? A première vue j'aurais dit Los Angeles, ou une ville ensoleillée en tout cas. » Pour Los Angeles, c'était clairement non. Pour le soleil, c'était plutôt oui. Miami possédait un climat tropical, avec des étés aux chaleurs juste supportables. « Une ville ensoleillée, oui. » confirmai-je. Même si Miami connaissait aussi une saison humide, de fréquents orages en fin de journée et parfois de violents cyclones, on ne pouvait nier qu'il s'agissait d'une ville ensoleillée, puisque la sécheresse régnait pour la plus grande partie de l'année. Un climat bien différent de celui auquel nous avions droit ici, soit dit en passant. « Miami, en fait. » Jewon s'était trompé en pensant que j'étais de Los Angeles, mais il n'était pas si loin de la vérité. « J'y vis depuis environ six ans. Je suis originaire du Canada. » précisai-je. Mon Canada natal que je retrouvai d'ailleurs le temps de cette émission.