Yasmine {23/04/12 - 03h45}

Alors qu’une deuxième semaine de jeu débute, rien n’a changé au sein de la chambre d’Athéna. Mes colocataires restent les mêmes, c’est-à-dire : Milo, Saoirse et Yasmine. Je m’entends plutôt bien avec les trois pour l’instant. Même si, à vrai dire, je n’ai pas eu l’occasion d’approfondir plus que ça la conversation avec l’un des trois. Mise à part des banalités échangées, je ne connais donc rien sur la vie de mes colocataires. J’espère changer cela. En attendant, ma nuit se poursuit aux côtés de Yasmine. Je n’ai absolument pas à me plaindre de la répartition des lits, car en plus d’être jolie, la jeune femme est du genre calme et pas embêtante. Par contre, moi, c’est une autre affaire. Si je ne ronfle pas, je suis le genre de mec à bouger pendant la nuit. D’ailleurs, me voilà en plein rêve ou plutôt cauchemar. Je me vois, en effet, combattant les flammes que je viens de provoquer en crachant du feu. « Au feu ! Au feu !» que je crie bêtement. Inutile de préciser que je rêve toujours mais que je viens probablement de réveiller la jeune femme qui se trouve à côté de moi. Zut !

« Au feu ! Au feu ! » Ces mots, je les entends d’abord dans mon rêve avant de me rendre compte, la deuxième fois qu'ils sont prononcés, qu’ils sont bien réels. Je me réveille instantanément, me retrouvant en position assise dans le lit. Mon regard scrute la pièce, cherchant à savoir d’où provient cet avertissement, et j’hume l’air, croyant pouvoir capter une fumée qui en fait, n’est que fictive. C’est en sentant mon voisin remué à mes côtés que je comprends d’où venaient ces cris qui m’ont tiré de mon sommeil. Il faut dire que je ne dors jamais bien dur, ces années dans l’armée m’ayant préparé à toutes éventualités, en cas d’urgence. Mais voilà, fausse alerte. La tension qui était apparu dans mon corps se dissipe lentement. Seulement, là, je suis bien trop réveiller pour me rendormir. L’adrénaline et ses effets néfastes, dirons-nous. Je tourne la tête vers Sacha, dont le repos semblait être plutôt agité. Dois-je le réveiller ? Il semble être pris dans un vilain cauchemar, à l’entendre et à le voir. Il est certain que ce n’est pas avec lui à mes côtés que je réussirais à retrouver Morphée. Doucement, je me tourne vers lui et, afin de ne pas le brusquer, je pose ma main sur son épaule qui est à découvert. « Sacha… Sacha… réveille-toi. » fis-je tout bas, mais assez fort pour que le principal intéressé réagisse.

Il fait nuit, très peu de lumières sont allumées mais j’arrive à reconnaitre les lieux : le parc autour du chalet. Me voilà entouré de personnes. Je jongle avec le feu. Parmi ces personnes, j’arrive à percevoir certains candidats de l’émission. Ils m’applaudissent et m’encouragent à continuer. Ils veulent que je crache le feu. Je m’y mets alors mais voilà que la flamme devient incontrôlable et se propage dans les herbes puis à une vitesse grand V contre les murs du chalet. Tout le monde crie et disparait à la fois. Je me retrouve seul devant des flammes géantes. Je ne sais quoi faire. Alors je crie « au feu » à deux reprises, sans savoir que mes cris interviennent dans la réalité et surpassent mon cauchemar. Je sens soudainement une main se poser contre ma peau tandis qu'une voix résonne dans mes oreilles. « Hein ? Qu’est ce qu’il se passe ? Il y a le feu ? » Autant dire que je divague complètement et que je me trouve entre le rêve et la réalité. Je mélange tout même. Chose très fréquente lorsqu’un bruit perturbateur agit sur le sommeil. Comment reconnaître immédiatement le rêve de la réalité ? C’est une bonne question à laquelle j’aimerai pouvoir répondre. En attendant, j’ouvre les yeux délicatement en entendant à nouveau la voix de ma voisine et je me redresse aussitôt sur l’oreiller. « Merci de m’avoir tiré d’affaire et..vraiment désolé de t’avoir réveillé. » Me voilà complètement éveillé et aillant retrouver mes esprits. Je suis assez gêné d'avoir arrachée la candidate des bras de Morphée.

« Hein ? Qu’est ce qu’il se passe ? Il y a le feu ? » Ce sont les premiers mots que mon camarade de lit prononce alors qu’il émerge lentement, mais sûrement, de son rêve – qui semblait plutôt être devenu un cauchemar. On dirait que son esprit n’arrive pas à faire la différence entre le vrai du faux, le réel du fictif. Je dois m’y prendre à deux fois avant qu’il ne revienne complètement parmi nous. Mon regard croisse le sien un instant, et alors qu’il se redresse un peu, je lui adresse un léger sourire en coin. « Merci de m’avoir tiré d’affaire et… vraiment désolé de t’avoir réveillé. » me dit-il, quand il retrouve enfin ses esprits. Il semble désolé de m’avoir tiré des bras de Morphée, mais il n’y a rien de mal à ça. Vraiment. « Oh, ça va. J’ai connu pire, tu sais. » Oui, j’ai connu pire, surtout durant mes années de service dans l’armée. Chaque soir, à l’époque, je m’endormais dans la crainte de ne pas voir le lendemain. Je n’étais pas pessimiste, mais plutôt réaliste. Nous étions en guerre, tout pouvait arriver. Ma main, toujours sur son épaule, se dégagea lentement, allant trouver refuge dans mes cheveux, replaçant quelques mèches de cheveux rebelles. « Tu veux… hm… en parler ? » lui proposais-je, comme ça. « Tu n’es pas obligé… mais ça te ferait peut-être du bien. » Bon d’accord, je n’étais pas vraiment la meilleure dans ce rôle de la confidente, mais comme il se trouvait que j’étais le seul autre être vivant éveillé à cette heure, le choix s’en trouvait plutôt réduit.

Tout juste remis de mon affreux rêve, Yasmine se montre chaleureuse et rassurante envers moi. Elle m’invite même à me confier. « C’est.. ce même cauchemar habituel. En tant que cracheur et jongleur de feu, c’est ma crainte. Ne plus pouvoir contrôler l’élément et être dépassé par la situation. Tu sais, mettre le feu. Quand j’étais plus jeune, j’ai failli tout faire cramer dans mon chapiteau. C’était moins une. Depuis, je suis conscient du risque. Mais c’est mon métier, ma passion, alors je dois forcément faire face aux mauvais côtés comme les cauchemars. » Étrangement, je suis encore plus bavard quand je suis fatigué. Presque un vrai moulin à parole. Heureusement que ma voix ne porte pas très haut. Pas trop de risque de réveiller les autres candidats dormant dans la chambre. « Je te remercie d’être là. » Je dois dire que je suis agréablement surpris du comportement de la candidate partageant mon lit. Aux allures plutôt froides et droites, elle agit à la perfection avec moi. De quoi être rassuré en somme après avoir fait un mauvais rêve. « Tu dis avoir connu pire. Pourquoi ça ? » Je reviens sur les mots précédents de la demoiselle qui m’intriguent assez.

Je lui ai proposé d’en parler, sans trop m’attendre à ce qu’il obtempère et qu’il me raconte son rêve dans les moindres détails. Et pourtant, c’est bel et bien ce qu’il fait, laissant couler les mots de par sa bouche d’une voix base, mais suffisamment haute pour qu’elle parvienne jusqu’à mes oreilles. « C’est.. ce même cauchemar habituel. En tant que cracheur et jongleur de feu, c’est ma crainte. Ne plus pouvoir contrôler l’élément et être dépassé par la situation. Tu sais, mettre le feu. Quand j’étais plus jeune, j’ai failli tout faire cramer dans mon chapiteau. C’était moins une. Depuis, je suis conscient du risque. Mais c’est mon métier, ma passion, alors je dois forcément faire face aux mauvais côtés comme les cauchemars. » J’acquiesce d’un signe de tête, comprenant tout à fait ce qu’il me raconte. Quand on fait un choix de vie qui implique un tant soit peu un certaine dose de danger, il faut être conscient des risques et savoir vivre avec ceux-ci, et les conséquences qu’ils peuvent avoir. Il n’aurait pas pu mieux trouver comme confidente à cette heure que ma personne. Car au travers de son récit, je me retrouve aussi. « Je te remercie d’être là. » laisse-t-il entendre quelques secondes plus tard, alors que le silence commençait à prendre légèrement sa place. « Y’a pas de quoi. » fis-je en lui offrait un léger sourire. « Tu dis avoir connu pire. Pourquoi ça ? » Quelqu’un qui ne connait pas mon histoire ne sait pas ce que mon passé recèle. Sa question est tout à fait légitime, en soi. « Se réveiller au bruit des bombes, entendre ses compagnons crier à tue-tête… disons que mes nuits sont plus calmes depuis que j’ai quitté l’armée, mais cela ne m’empêche pas de revoir en rêve le visage de ceux que j’ai connu et qui ont péri là-bas. » avouais-je finalement, dans un murmure. « Mais tout comme toi, j’ai appris à vivre avec. Ils hantent ma mémoire, mais au moins, je ne les oublie pas. » Aussi drastique que ce soit.