Recroquevillée sur elle-même, paquet de guimauves dans les bras, Lust, en claire, elle s’ennuie. Comme d’habitude depuis qu’elle est ici. Son Emrys lui manque, en fait. Son Emrys, c’est l’espèce d’ogre qui lui sert de meilleur pote. Et accessoirement, son seul pote aussi. C’est drôle, parce que quand Lust lui a dit qu’elle avait trouvé un bon moyen de gagner de l’argent, et qu’elle lui avait expliqué qu’elle avait passé un casting pour participer à une télé-réalité bidon, Emrys lui a dit qu’elle n’avait aucune chance d’être prise. Le genre clocharde, ce n’est pas très glamour. Et finalement, elle est bien dans cette télé-réalité bidon. A passer ses journées et surtout ses nuits dans un chalet. Alors qu’Emrys, lui, il continue sans doute à galérer pour trouver un endroit où pioncer. Il aurait dû passer ce casting, lui aussi. Lust lui avait même proposé de faire semblant d’être un de ces « couples ». Ils auraient été crédibles en plus. Mais bon. En fait, penser à Emrys la déprime un peu, vous savez, parce qu’il lui manque, et qu’il n’a pas la chance d’être dans la même situation qu’elle actuellement. Elle lève les yeux, et voit un type un peu plus loin. Dimitri, si elle se souvient bien de son prénom. Lust fourre un Chamalow dans sa bouche. Elle en prend un autre et tente de viser Dimitri. Loupé à une dizaine de centimètres. Second essai, touché sur la tête. Troisième essai, sur les fesses. Quatrième essai loupé. Elle continue.

J'avais passé une bonne partie de mon après-midi à nettoyer la cuisine, et j'étais juste claqué. Il n'avait beau être que seize heures et des poussières, je n'avais désormais qu'une envie : dormir. Mais voilà, je ne pouvais me permettre de monter jusqu'à ma chambre et de me jeter dans mon lit pour y faire un somme alors qu'il y avait probablement d'autres pièces, dans ce chalet, à nettoyer de fond en comble. Oui, je m'épuisais sans doute pour rien et même si je reconnaissais bien volontiers que ça n'était pas à moi de m'atteler aux tâches les plus désagréables, je croyais bon de me rappeler que si je ne le faisais pas, personne ne le ferait à ma place. Et puis bon, le ménage ça détend. Si si, même si je faisais une petite allergie à la poussière. Je passai alors dans le salon, faisant le tour de celui-ci sans même remarquer la présence d'une demoiselle sur l'un des sofas. Non, mon attention n'était portée que sur les fenêtres de la pièce, pleines de traces de doigts, ainsi que sur la table basse qui avait semble-t-il besoin d'un bon coup de chiffon. Je n'eus cependant pas le temps d'effectuer quoi que ce soit, car mon regard fut soudainement attiré vers un projectile qui passa au ras de mon épaule. Tombé à terre, je m'approchai de celui-ci en faisant un pas ou deux ; c'était une guimauve, me semble-t-il. J'entrepris de me retourner pour voir qui pouvait bien l'avoir lancé, et me pris alors sur le dessus de la tête un second projectile ; une guimauve, toujours. La troisième atterri jusque sur mes fesses, tandis qu'une quatrième tomba à terre. Bientôt, de plus en plus de guimauves furent lancées sur moi, par une demoiselle qui en tenait tout un paquet entre les mains, Lust si je ne me trompe pas. J'eus alors pour réflexe de me débattre inutilement, disposant mes mains devant moi comme si celles-ci pouvaient m'éviter de recevoir les dizaines et les dizaines de guimauves successivement jetées par la demoiselle. « Hey hey hey ! Stooop ! » Elle sembla s'arrêter un moment, et j'en profitai alors pour caser quelques mots avant qu'une autre fournée ne soit lancée. Mine de rien, le paquet était loin d'être bientôt vide. Elle avait encore pas mal de munitions, en somme. « Si... si y'a bien quelque chose qui m'in... m'insupporte, mis à part les gens sans cœur, c'est... qu'on gaspille la... la nourriture. » J'étais pâtissier, et tout aliment quel qu'il soit - même des sucreries - ne devait être gâché selon moi. J'ignorais si Lust allait m'écouter et cesser ses enfantillages, ou si au contraire mes présentes paroles n'allaient faire que pousser la jeune femme à continuer de plus belle. J'étais quand même loin, très loin, d'être quelqu'un de persuasif.

Vous voyez, visiblement, Lust a choisi la cible parfaite pour ce genre de truc. Parce que le voir se débattre, tout seul, gigoter des bras, c’est franchement poilant. De quoi remonter efficacement le moral, à Lust, je vous assure. Il lui en faut peu, certes. Dimitri sort quelques mots, Lust s’arrête pendant quelques secondes et fourre un bonbon entre ses lèvres. Obéissante, vous voyez. Il recommence à l’ouvrir. Ouais, il bégaye. Lust avait oublié ce détail. Un sourire amusé se dessine sur son visage. C’est qu’il est drôle. Lust rit, d’ailleurs. Faut croire que Lust a tous les critères pour être détestée par ce candidat. Elle gaspille la nourriture, et certains lui ont déjà dis qu’elle n’avait pas de « cœur ». Hm. Ce qui est faux, elle a des sentiments, émotions et tout le tintouin, comme tout le monde hein. Seulement, elle s’exprime à sa façon. Ouais. Elle plonge sa main dans le paquet de confiseries. « Tu devrais être flatté, franchement, j’essaye d’attirer ton attention là ! » Plus ou moins vrai, finalement. C’est un moyen comme un autre, vous savez. Un genre de ‘regarde-moi j’existe’, en fait. « Eh, j’ai une idée, tu devrais essayer de les rattraper avec ta bouche, tu sais. Ca éviterait le gaspillage. » Après avoir englouti un autre marshmallow, elle en envoie un autre sur le candidat. Ok. Il ne se prête pas au jeu du tout. Ou alors si, mais il n’est pas très doué côté précision et a franchement loupé le marshmallow. « Allez ! Si t’en choppes au minimum trois sur cinq, je te promets une belle récompense. »

Ah, mais quelle idée franchement de me jeter des guimauves. Cette demoiselle devait franchement s'ennuyer ou bien avait peut-être tout bonnement décidé de ne plus s'empiffrer avec ça. Une bien bonne résolution, car il me semblait que ce genre de confiseries n'étaient pas forcément très bonnes pour la ligne. Je parlais en connaissance de cause, étant pâtissier et connaissant les ravages des bonnes choses sur le corps humain. En tout cas, une chose était certaine, cette situation amusait beaucoup la jeune femme. D'ailleurs, elle se mit à rire après que j'eus ouvert la bouche pour la réprimander. Mon bégaiement, sans doute. Bah, j'avais l'habitude d'essuyer les moqueries, après les années. « Tu devrais être flatté, franchement, j’essaye d’attirer ton attention là ! » Flatté qu'on s'intéresse à moi, qu'on cherche à attirer mon attention, vraiment ? Bah étrangement, malgré les paroles de la demoiselle, je ne me sentais pas particulièrement flatté, non. « Et bien... c'est bon, hein, je... j'ai vu que t'étais là. » Si elle souhaitait se faire voir, c'était réussi. Et qui allait ramasser les guimauves tombées au sol, hein ? Tsss, certainement pas elle. Je sentais que cette tâche serait pour moi, oh oui je le voyais arriver gros comme une maison. « Eh, j’ai une idée, tu devrais essayer de les rattraper avec ta bouche, tu sais. Ca éviterait le gaspillage. » Elle lança alors aussitôt une nouvelle guimauve, que je ne pus bien évidement pas rattraper car pas du tout préparé, pour le coup. « Eeeeh ! Mais... attends ! O... okay, on va faire ça. C'est tou... toujours mieux que de les lancer par terre, c'est... certain. » Raaah la nourriture gaspillée, ça m'horripilait juste totalement. Alors tant qu'à faire, autant essayer de rattraper les guimauves avec ma bouche. « Allez ! Si t’en choppes au minimum trois sur cinq, je te promets une belle récompense. » Ah, voilà qui devenait fortement intéressant. Mais elle m'intriguait tout de même. « Ah oui ? Et... qu... quelle genre de récompense, au juste ? » Je voulais bien me prêter au jeu, mais elle venait d'éveiller ma curiosité. Je pris alors un air interrogateur et franchement suspicieux. Qu'avait-elle derrière la tête ?

Le pire, c’est qu’elle cherchait vraiment à attirer son attention, Lust, vous savez. Rien de méchant, ou de provocant là-dedans, à la base. Soit. Elle est surprise de constater qu’il accepte son idée, à elle. Franchement, ouais, elle ne s’y attendait pas et était d’ailleurs à peine sérieuse lorsqu’elle a formulé son ‘idée’. Mais s’il accepte, et bien, très bien, ma foi. On ne va pas laisser passer ça hein ? Ah, oui, forcément, il s’intéresse à la « récompense » que Lust peut avoir en tête. A vrai dire, c’était aussi une parole en l’air. Mais puisqu’il se prête au jeu. Lust se mordille la lèvre, réfléchis. Elle a la vague impression d’être dans sa vraie vie, là, vous savez. Lorsqu’elle bosse, qu’elle doit chercher à cerner la personne en face d’elle pour la faire raquer. Un maximum. On aura beau dire, finalement, être strip-teaseuse, ce n’est pas tellement montrer ses fesses aux gens, mais surtout les faire raquer. Faut les cerner, pour réussir à les convaincre de claquer quelques billets. L’ennui, ici, c’est que Dimitri, comme la plupart des candidats dans ce jeu, Lust ne s’y est pas intéressée. Jamais. Alors pour le cerner, ce sera sans doute plus compliqué. Elle voit qu’un grand timide, un peu maniaque. Pour l’instant. Elle se lève, fait quelques pas pour se rapprocher du candidat. « Eh bien, j’ai bien quelques idées derrière la tête. Mais la rouquine, elle risquerait d’être jalouse après. » Quoi qu’elle n’en sait strictement rien, mais d’après ce qu’elle a pu comprendre, apparemment, il s’passe un truc entre eux, non ? Hm. Pas ses affaires, de toutes façons. « Quoi que ça t’arrangerait peut-être. Tu l’aimes bien, la rouquine, hein ? » D’après ce qu’elle a entendu. Elle secoue la tête. « Peu importe. » qu’elle lâche, comme pour mettre fin à ses propres pensées à elle. Pas si intéressant que ça. Soit. Elle lève les yeux, un fin sourire se dessine sur son visage. Hm. Elle ne pense plus du tout à Emrys et va mieux, du genre, vraiment mieux. « Prêt ? » elle l’interroge du regard. On s’amuse comme on peut ici, vous saisissez. Avant de regagner le canapé, Lust se mordille une nouvelle fois les lèvres, doutant sur une chose. Et puis, elle agrippe le candidat, en posant sa main derrière sa nuque pour l’attirer contre elle, et poser ses lèvres sur les siennes, pour retourner s’installer sur le canapé ensuite. Baiser rapide. Pas qu’elle soit furieusement en manque d’affection. Une expérience, simplement. Voir sa réaction. Ouais. Sourire amusé aux coins des lèvres, elle patiente quelques secondes, et lance un premier chamallow en direction de la bouche du candidat.

Je me méfiais quand même des réelles intentions de la demoiselle. Après tout je ne savais pas grand chose d'elle, mis à part le fait qu'elle jetait des guimauves sur ceux dont elle souhaitait attirer l'attention. Une personne normale aurait utilisé sa voix, histoire de se faire entendre, mais chacun était encore libre de procéder comme bon lui semblait. Ce qui m'intriguait, tout de même, c'était cette récompense dont elle m'avait parlé. J'aurais en effet droit à une petite surprise si je parvenais à rattraper trois des cinq guimauves qu'elle me lancerait. Si rien ne me garantissait de pouvoir rattraper celles-ci avec ma bouche, je me demandais quand même ce à quoi j'aurais droit si j'y parvenais au final. « Eh bien, j’ai bien quelques idées derrière la tête. Mais la rouquine, elle risquerait d’être jalouse après. » Oula, pas sur. Voyez-vous, le jaloux dans l'histoire c'était plutôt moi. Et puis, à moins que ces idées que Lust avait en tête étaient très peu chrétiennes, je ne voyais pas comment cela pourrait rendre Saoirse jalouse, comme elle disait. Et puis même, la rouquine ne devait pas porter grande attention à mes agissements. « Quoi que ça t’arrangerait peut-être. Tu l’aimes bien, la rouquine, hein ? » demanda-t-elle alors, sans même me laisser le temps de répondre et en enchainant aussitôt sur un « Peu importe. » Ce que je ressentais pour Saoirse était assez indescriptible. Ça n'était certainement pas de l'amitié, mais pas non plus de l'amour. Sans doute entre les deux, en fin de compte. « Prêt ? » Hum, je n'étais pas certain de l'être mais était-on jamais vraiment prêt à rattraper des guimauves ? « Je... je pense. » Là, après m'avoir adressé un sourire, elle s'approcha de moi et déposa sur mes lèvres un baiser tout en ayant saisi ma nuque de par sa main. Elle retourna finalement s'assoir sur le canapé, tandis que je restai un instant sous le choc. Mais... pourquoi ce baiser ? Il ne m'avait pas déplu, au contraire, seulement je ne m'y attendais carrément pas pour le coup. « HUM. Je... c'est... quand tu veux. » Je devais avoir l'air d'un sombre idiot, tremblottant sur place et raide comme un piquet. Une vision qui sembla amuser la jeune femme. Finalement, celle-ci entreprit de me jeter la première guimauve. Et là, miracle, je parvins à la gober. « OUICH ! ET DOUW UNE ! » J'avais comme qui dirait la bouche pleine, mais je ne pouvais m'empêcher de me réjouir d'avoir rattrapé la première guimauve d'une série de cinq. Je finis par mâcher et avaler celle-ci, avant de ne me baisser un peu, me mettant ainsi en position pour la prochaine lancée. Je la voulais, cette récompense ! « Tu peux... lancer la deuxième, c... c'est bon ! » Là, on pouvait clairement dire que j'étais prêt. Par ailleurs j'espérais qu'elle lancerait celle-ci aussi bien que la première, qui avait été à ma portée sans soucis. Allez, je croyais dur comme fer à mes chances de rattraper cette seconde guimauve.