Chacun a ses faiblesses. Ses péchés mignons. Moi j'en avais plein. Parce que j'étais un épicurien et parce que je ne me refusais rien. Entre autres. D'ailleurs, il était facile de se laisser aller à ses envies au chalet. Aucunes restrictions. Je commençais à m'habituer à ce quotidien bien trop facile, bien trop cool pour être réel. À ce moment-là, je m'apprêtai à céder à deux faiblesses en même temps – je n'étais clairement pas du genre à faire les choses à moitié. Parce qu'il faisait chaud et parce que j'avais faim, j'allais m'offrir un (petit) encas sous forme de glace. Parce que j'en avais envie, tout simplement, et aussi parce qu'il était l'heure de boire (sept heures précises), j'allais par la même occasion céder à la tentation de l'alcool. Je descendis donc au cellier, fouillais le congélateur et en sortis deux pots de glace de tailles satisfaisantes. Je les pris sous mon bras et me hâtai de remonter jusqu'au bar-lounge (c'était froid). Je savais que je pourrais y trouver plus d'alcool que besoin. Sur le chemin, juste devant la porte du bar-lounge en fait, je croisais Saoirse. Et comme je n'avais pas envie de profiter de ces plaisirs tout seul, je l'invitai à me rejoindre : « Glace et alcool, ça te dit ? » Je souris. Qui pourrait décemment répondre non ? Je la pris donc par le poignet et l'entraînai en direction du bar.

N’empêche, je ne faisais rien, mais l’heure tournait quand même, et ça c’est vraiment fou. Genre, je suis allongée sur mon lit, je suis allongée sur le canapé du salon et sur celui de la pergola, et voilà que l’après-midi était déjà passée. Ouai, moi, Saoirse, à glander sans bouger, c’est ça qui est complètement fou, mais complètement réel aussi. Enfin bref, ce n’était pas le sujet ; parce là, fallait bientôt bouger son cul pour faire à manger et tout, et je ne suis juste pas douée du tout pour ça quoi. Alors j’allais tout simplement me faufiler discretos vers l’escalier pour rejoindre de nouveau ma chambre, mais Emmett m’arrêter dans ma fuite avec deux pots de glace sous les bras. « Glace et alcool, ça te dit ? » Je fis une petite grimace, tout en plissant les yeux. Ouai, c’est comme ça que je réfléchi… ça peut faire peur. Je mis mes deux mains sur les hanches, lui demandant finalement : « Et qu’est-ce que tu veux de moi ? Tu ne vas pas me saouler j’espère !... » Je fronçais cette fois les sourcils avec une moue choquée, avant de que mon visage ne change d’expression du tout au tout. « … mais genre saouler avec de l’alcool hein, pas parce que t’es chiant…» Me rattrapais-je. Bah ouai, l’es pas chiant le Emmett. Il est même plutôt sympa. Bon, je ne comprendrais jamais ce qu’il trouve à Hortansia, mais ça, ça fait partie des mystères de la vie. « Parce t’es pas chiant… bon… je me tais. » Finissais-je par dire, en baissant un peu la tête, lâchant par la même occasion un rire. Evidemment, tout ça équivalait à un grand oui de ma part et ça, il l’avait bien comprit. Il m’attrapait le poignet et m’emmenait vers le bar. « Ca sera une vodka pour moi, s’te plait, barman ! » lui demandais-je, en sautant sur l’une des chaises de bar.

Le hasard avait bien fait les choses, Saoirse était sans doute la candidate idéale pour jouer les gourmands avec un pot de glace et boire un ou plusieurs verres par la même occasion. Cependant, elle n'avait pas l'air aussi enthousiasme que j'aurais pu le penser. Elle grimaça, réfléchit, mit ses mains sur ses hanches pour me demander : « Et qu’est-ce que tu veux de moi ? Tu ne vas pas me saouler j’espère !... » En fait si, un peu. Et se goinfrer de glace, aussi. Elle enchaîna rapidement : « … mais genre saouler avec de l’alcool hein, pas parce que t’es chiant…» Je fronçai les sourcils – était-ce une critique ou bien... ? « Okay... » dis-je, sans tout comprendre. J'eus rapidement ma réponse. « Parce t’es pas chiant… bon… je me tais. » finit-elle avant de se mettre à rire. J'esquissai un sourire et haussai les épaules. Je n'avais pas exactement compris où Saoirse voulait en venir avec son monologue, mais je prenais ça pour un oui – quoi qu'il en soit je n'aurais accepté aucune autre réponse. Je l'entraînai donc en direction du bar et finalement elle me suivit sans rechigner. Je m'installai derrière le bar, pendant que Saoirse prenait place sur l'une des hautes chaises du bar. Je pris les deux pots de glace que j'avais encore sous le bras, les ouvris et en posai un devant Saoirse, l'autre devant moi. Je trouvai vite deux cuillères sous le bar et les plantai chacune dans un pot. « Ca sera une vodka pour moi, s’te plait, barman ! » me demanda alors Saoirse. À me concentrer sur ma gourmandise et la glace, j'allais presque en oublier l'alcool. Je pris donc une bouteille de vodka et deux petits verres. Je nous servis deux shots de vodka et poussai l'un des deux devant Saoirse. « Et voilà, mam'zelle. » dis-je avant de faire tinter mon verre contre le sien.

Bon d’accord. Fallait parfois que je me taise, parce qu’à force de m’emmêler les pinceaux en parlant trop, l’on pourrait mal me comprendre. Mais autant suis-je franche, autant je ne blesse pas les gens ; ou pas consciemment. Enfin, là je ne le critiquais pas du tout, au contraire. Emmett ne tenait pas compte de ce que je venais dire : tant mieux après tout. S’il voulait manger et boire, il n’y avait pas besoin de taper la discutions pendant deux heures sur qu’est-ce que je viens de dire. Finalement, nous étions au niveau du bar, moi dans le rôle de la cliente, Emmett dans celui du barman. Oh que ça faisait un moment que je n’avais pas bu de vodka, alors que de la glace, j’en mangeais pas mal quand même. Ce fut avec réel plaisir que j’accueillais ce shot que venait de me verser le jeune homme. « Et voilà, mam'zelle. » Je lui offrais mon plus large sourire en le remerciant, l’avançant aussi pour les entre choqué, puis le liquide à la base froid coula et brûla ma gorge. « Waaaaah encore un s’il te plait ! » Lui demandais-je, en claquant le petit verre sur le bar, avant de me saisir d’un des pots de glace : à la vanille ! Une première cuillerée dans la bouche, je bougeais sur place pour réagir à ce froid polaire. Je sais bien que la glace, c’est froid, mais ça me fait toujours un choc. J’avalais tout en lui demandant dans la foulée. « Dis… dis, tu kiffes Hortansia ? »

De même que Saoirse, je descendis mon verre de vodka d'une traite. C'était délicieusement fort, ça brûlait agréablement la gorge. « Waaaaah encore un s’il te plait ! » me demanda alors Saoirse. En bon barman improvisé, je m'exécutai et nous servis chacun un shot de vodka supplémentaire. Je plongeai ensuite ma cuillère dans mon pot de glace et en avalai une grande cuillerée pour apaiser la brûlure au fond de ma gorge. Parfait. Glace et alcool, un mélange du tonnerre. « Dis… dis, tu kiffes Hortansia ? » Je fronçai les sourcils, surpris par cette question pour le moins inattendue. Et puis, finalement, je souris, de sa spontanéité, de la façon dont la question était posée. « Je ne sais si on peut dire que je la 'kiffe', » répondis-je en haussant vaguement les épaules « mais je l'aime bien et on est plutôt proches, oui. » ajoutai-je en toute sincérité. Je pris mon verre de vodka à nouveau plein, le vidai aussi vite que le premier et, comme je venais de le faire, j'enchaînai avec deux cuillerées de glace. Un délice. Quand j'eus terminé d'avaler ma glace, je demandai à Saoirse : « Et toi, tu kiffes Dimitri ? » lui demandai-je en réemployant volontairement exactement la même tournure de phrase qu'elle. « Ou Milo ? Ou Angel ? Ou quelqu'un d'autre ? » Je souris, légèrement insolent. Il était manifeste que Saoirse, jolie, amusante et adorable comme elle l'était, faisait l'unanimité dans le chalet, surtout auprès des candidats masculins, et, d'après ce qu'on disait, elle avait de nombreux prétendants.