ft. briony.
17 AOÛT, 10H03.

Appuyé sur le lavabo, tête penchée, respiration lente et profonde, Pablo essayait de calmer la migraine qui lui cisaillait la tête. Réveillé par un mal de crâne pas possible, qui l'avait torturé toute la nuit, le jeune homme avait d'abord comaté quelques minutes dans son lit avant de finalement se traîner jusqu'à la salle de bain qui, merci Jésus Marie Joseph, était encore - ou déjà - vide. Après s'être brossé les dents, essayant de penser à autre chose, il s'était aspergé le visage et les cheveux d'eau. Redressant la tête, il croisa le regard vide de son reflet. Automatiquement, il détourna le visage. Se dirigeant finalement vers les douches, dont il espérait que celle qu'il prendra atténue un peu sa migraine, il attrapa l'un des pommeaux amovibles pour tester la température de l'eau qui lui coulait sur les doigts. À ce moment-là, la porte claqua dans son dos, le faisant sursauter. Dans un stupide réflexe, il s'était retourné et avait brandit le pommeau en direction de l'entrée. Briony, qui venait d'entrer, se retrouva en pleine ligne de mire du jet. « Aaaah ! je suis désolé ! vraiment désolé ! » s'exclama Pablo, stupéfait, en abaissant aussitôt l'arrivée d'eau. Roh non, elle allait sans doute se mettre à lui hurler dessus, juste pour le plaisir de l'engueuler. Il ignorait pourquoi elle aimait autant lui faire la misère. Mais non, finalement, c'était juste très drôle - lui-même, il aimait bien lorsqu'elle lui lançait des regards noirs. « Non, en fait, je ne le suis pas du tout. » Il eut un petit sourire en voyant son expression.

Simplement excuses pardonnées. Ah. D'accord. Pablo se surprit à remercier mentalement les dieux. Pour être honnête, il n'aurait pas supporté des reproches. Notamment et principalement car ça lui aurait tué le cerveau, déjà suffisamment mis à mal à son goût. De plus, mis de mauvais humeur par ce fait, il n'aurait put résister à l'envie de la rabrouer méchamment. S'il était jusqu'à maintenant resté diplomate et plutôt, disons, gentil, il en parfaitement était capable. Mais agir d'une telle façon ne jouerait pas en sa faveur, alors il s'abstenait. Bref, à son tour - ne prenant pas la peine de se déshabiller plus qu'il ne l'était déjà, seulement vêtu de son boxer - il se glissa sous la douche, laissant l'eau chaude dénouer les muscles de sa nuque et de son dos. En entendant à nouveau la voix de Briony, il tourna légèrement la tête vers elle, avant de sourire brièvement et de regarder à nouveau face à lui, achevant de tremper ses cheveux avec sa main. « Tu n'as pas compris, c'est juste pour que tu sois jalouse » fit-il, vaguement sarcastique, fermant étroitement les yeux en grimaçant, tentant de faire le vide. Ah ! Il l'avait attendue, celle-là. Cela faisait des semaines qu'il savait que la jeune femme allait revenir à la charge pour le charrier. N'empêche que ça le fit doucement sourire. Même si ce n'était qu'une boutade - ou peut-être pas, avec elle, il fallait s'attendre à tout - Hassan, l'homme de sa vie ? Non, il n'avait pas d'homme de sa vie. Ni de femme de sa vie. Ni quoi que ce soit d'approchant. « Non, en fait, je me suis dit puisque Briony a décidé que j'étais gay, c'est que ça doit être vrai ! » Il se rappelait encore du soir où il avait fait ses premiers pas sur le bateau. Avec elle. De leur sympathique petite discussion. À vrai dire, qu'on puisse se méprendre sur son orientation sexuelle ne le dérangeait pas outre mesure.

Étrangement, Pablo commençait à se sentir doucement mieux. Pas que sa migraine s'atténuait, mais il finissait par s'habituer, et ses capacités de réflexion reprenaient peu à peu la place qui leur était due d'habitude. Il était étonné. Était-ce simplement car il y pensait moins, la présence de Briony l'aidant à se concentrer sur autre chose ? Ou était-ce réellement la douche ? Placebo, or not ? Bref, il était dans ses pensées, et ne capta que la fin de la réplique de sa compagne. Se jeter par dessus bord ? Quelle idée. Malgré l'ironie de la chose, il ne put s'empêcher de penser - son imagination fonctionnait plus vite que le reste de son esprit - à tous ces gens qui, réellement, essayaient de se donner la mort par amour. Il secoua vaguement la tête. Non, décidément, il ne comprenait ce genre de geste. Oh mon dieu ! elle rigolait ! Appelez une ambulance, elle allait certainement se coincer la mâchoire ! Encore plus incroyable : il la faisait rigoler. La savoir définitivement capable de rire la fit déjà remonter un peu dans son affection. Peut-être même qu'un jour, il la supporterait, tiens ! Ah, blague, évidemment. Elle sortait déjà de l'eau, alors qu'il attrapait à peine le gel douche. Commençant à se frictionner avec le savon, il dut tourner à moitié la tête pour l'entendre, le bruit du jet lui accaparant les oreilles. « Et toi ? » marmonna-t-il, lorsqu'elle l'accusa de ne pas parler. Vrai, elle n'ouvrait pas plus sa bouche que lui. Ah. Ben si, en fait. Il rigola dans sa barbe en entendant son monologue. Il eut même le temps d'achever de se laver totalement - cheveux compris - pendant qu'elle émettait des hypothèses totalement farfelues sur la possible vie de Pablo. « Aux dernières nouvelles, je suis prof de littérature. Et pas de commentaires ! » ajouta-t-il en brandissant un index autoritaire vers elle. Non parce qu'il commençait à la connaître, la Briony, hein. Sortant à son tour de la douche, après avoir éteint l'eau, il attrapa sa propre serviette, et commença à s'essuyer. Vite fait, bien fait, pour lui. Il ne s'enroula même pas dedans, si ce n'est lorsqu'il entreprit de changer de sous-vêtement. « Info pour info : des frères, des sœurs, neveux, nièces, ou entre les deux ? » demanda-t-il, ironisant les derniers mots, et se tournant vers elle, les doigts dans les cheveux pour les décoller de sa tête.